«Technique»

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« Technique »

Appel à contributions pour le n°2010-4 de Romantisme . Revue du XIXe siècle

Romantisme consacrera son dernier numéro de l’année 2010 à la technique, sujet que la revue a souvent abordé de biais (La machine fin de siècle, n°41, Sciences pour tous, n°65, L’idée de progrès, n°108) mais jamais frontalement, c’est-à-dire sur la base de la distinction entre science et technique. On ne prétend pourtant plus aujourd’hui que la littérature du XIXe siècle soit « passée au travers des révolutions techniques sans se soucier d’autres techniques que des siennes propres » (A. Thibaudet). On a même dépassé l’alternative, fondée sur la réduction des textes à l’exposé d’une opinion préconstituée et sur la disqualification de l’utopie d’ « un monde toute circulation et tout amour dont les chemins de fer sont les artères » (Hugo), qui l’enfermait entre, d’une part, un « scientisme généreux et simplet, attendant béatement de la science toutes améliorations individuelles et sociales » grâce à ses applications techniques (J.-J. Bridenne) et, d’autre part, un romantisme enténébré, tournant les tables dans l’ombre de la « grande barbarie éclairée au gaz » (Baudelaire). Des révolutions techniques la littérature du XIXe siècle s’est souciée sans confondre, au contraire des vulgarisateurs de l’époque, les « merveilles de la science » et la technique elle-même. Des siennes propres sans réduire, au contraire des promoteurs de l’ « union des arts et de l’industrie », la « modernité » à une rénovation des décors et des thèmes de la poésie ou du roman. De nombreux travaux ont montré depuis trente ans que la littérature du XIXe siècle a dû « compter avec » (Zola) la civilisation technicienne. Elle a ainsi travaillé à acculturer des objets étrangers à la plastique et à la mythologie patrimoniales (les machines) ; à fonder en légitimité esthétique et cognitive des expériences inédites (le voyage en train) ; à penser comme principe d’institution d’un ancien et d’un nouveau régimes de la technique, et de ses rapports avec la science, la politique, l’économie et la religion, cette révolution globale que furent la Révolution française et la révolution industrielle ; à mesurer, enfin, combien la littérature est « conditionnée » par « l’évolution des techniques qui modifient les rapports de l’homme avec le monde » jusque dans son « fonctionnement » (M. Milner).

Aujourd’hui se développent des recherches plutôt attentives – outre au cas très particulier de la photographie – aux rapports entre la littérature du XIXe siècle et les savoirs qu’elle « met en texte » ou produit. La subordination de la technique à la science, la péremption de l’utopie techniciste, la nécessité de réorienter la lecture des œuvres de Zola ou de Verne, mais aussi les exigences de la reconnaissance institutionnelle de la recherche, ont conduit à un relatif abandon de ces perspectives, insuffisamment explorées pourtant, où se sont construites les relations de la technique et de la littérature. On se propose de les rouvrir et au besoin de les compléter ainsi :
1) La présence des réalités techniques dans la vie quotidienne (technicité du travail, spectacle des travaux relatifs à l’haussmannisation, progrès de l’éclairage public et domestique, aménagements pratiques en matière d’hygiène privée, développements de la mesure du temps) et leurs conséquences sociales et individuelles.
2) La chronologie et la logique de la subordination croissante des techniques aux sciences telles qu’on les a conçues dans les entreprises d’histoire ou de vulgarisation de toute nature, dans les premiers développements de l’enseignement technique, dans la « technologie » entendue au sens strict.
3) Le topos du progrès technique dans la rhétorique du discours politique, et sa capacité à articuler Révolution française, révolution industrielle et construction de la communauté nationale.
4) La mobilisation d’images, de catégories et de concepts empruntés à l’univers technique, passé ou contemporain, dans la représentation d’événements et de processus historiques, politiques, sociaux, esthétiques ou intellectuels. Les propositions des historiens (histoire sociale et culturelle, histoire des sciences et des techniques) seront bienvenues, ainsi que celles qui, en littérature, s’attacheront à la première moitié du XIXe siècle et/ou à d’autres genres que le roman ou le manifeste poétique et s’obligeront à des approches non monographiques.

Les propositions de contribution sont à adresser avant le 30 juillet 2009 à David Charles (davidcharles@wanadoo.fr).

Les articles issus des propositions retenues seront soumis à la revue en mars 2010.

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