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La littérature s’est-elle jamais distinguée de l’univers des savoirs au point de s’en isoler totalement ? Ne trouve-t-on pas au contraire, dans les œuvres comme dans les réflexions explicites des écrivains, la trace d’une imbrication toujours présente et active ? En voulant faire des entreprises littéraire et scientifique des champs à l’identité close, notre culture ne s’est-elle pas rendue partiellement aveugle à la réalité d’un fondement cognitif commun ? La revue Épistémocritique explore ce point aveugle.

Les études littéraires ont vu émerger, ces dernières décennies, des approche interdisciplinaires et transdisciplinaires où se croisent littérature et science : écocritique, géocritique, zoopoétique, humanités médicales étudient la littérature au contact de l’écologie et de la biologie, de la médecine et des neurosciences cognitives. Mais de l’Antiquité aux Lumières, du Moyen Âge à la Modernité industrielle des 19e et 20e siècles, artistes et écrivains ont dialogué avec toutes les sciences ; physique, chimie, mathématique, astronomie, économie… La revue Épistémocritique étudie ce dialogue qui traverse la littérature française et francophone, européenne, américaine et internationale ; contemporaine et issue des siècles passés.

La connaissance peut prendre bien des formes et sait, selon les besoins et les moments, forger des outils très divers. Les savoirs et leurs langages peuvent jouer ce rôle dans le travail de l’écrivain, tout comme le scientifique ne peut se passer des jeux du langage et de ses puissances de figuration. La perspective épistémocritique consiste, devant un texte, à se poser la question des usages que fait ce dernier de ce qui relève des savoirs, parfois des sciences, au sens le plus élaboré de ce mot. Quelle est la nature du rapport épistémique entre un texte et son lecteur, lui dont cette expérience mobilise les facultés cognitives, parfois pour l’édifier, le plus souvent pour ébranler ou réorganiser ses certitudes ? Beaucoup d’études s’attachent à ce type d’interrogation et depuis longtemps. Elles peuvent s’inspirer de l’histoire, de la sociologie, de l’herméneutique ; elles peuvent viser des œuvres particulières, des carrières d’écrivains singuliers, voire des groupes ; elles dissèquent parfois un détail jugé révélateur et parfois préfèrent regarder les choses de haut, pour comprendre le travail des savoirs à travers toute une époque. Dans tous les cas, la perspective épistémocritique récuse les procédures d’isolement disciplinaire et refuse les partages préconstruits entre les « deux cultures », où elle ne voit que la traduction contingente des représentations propres à un moment de la culture occidentale.

De la même façon, concernant la littérature, elle ne veut pas distinguer, quant au fond de sa problématique, entre poésie et roman (celui-ci étant supposé, depuis l’invention du « réalisme », plus apte à prendre en compte les savoirs). Mais tous les arts sont partie prenante de ce procès, à commencer par le cinéma et les arts plastiques. Concernant les savoirs, symétriquement, est-il utile (et possible) de distinguer entre sciences et pseudosciences, dès lors qu’il s’agit de leur appropriation littéraire ? De très nombreuses questions, souvent complexes, restent posées et beaucoup d’œuvres restent à étudier, surtout dans le champ critique français. Fondée en 2007, Épistémocritique est le premier forum francophone réservé à de tels questionnements. Ce périodique électronique a pour but de servir à construire un espace commun de réflexion, d’analyse et de discussion.

 

ISSN 1913-536X ÉPISTÉMOCRITIQUE (SubStance Inc.)