13 – 11 septembre, mon amour de Luc Lang ou l’écriture d’une « apocalypse moderne »

Le récit 11 septembre, mon amour est ancré dans la catastrophe des attentats de 2001 : leur étant quasi concomitant, il a aussi été écrit in situ. C’est à une écriture du témoignage répondant à l’appel de l’Histoire que se livre Luc Lang. Les écrans omniprésents diffusant les « radiations CNN », à l’« abyssal pouvoir d’hypnose », font paradoxalement écran à la saisie de la catastrophe au sens où « la mort est partout mais elle n’épouse aucun corps ». Contre cette déréalisation de l’horreur, Lang se livre à une écriture sensible des attentats, à la fois au sens d’empathique et de sensorielle. Pour donner à éprouver cette « apocalypse moderne » sous toutes ses facettes, Lang choisit également une configuration narrative résolument polyphonique en donnant voix notamment aux victimes qui étaient à bord des avions. La catastrophe, rendue d’un point de vue immersif, est aussi appréhendée de manière sérielle. L’Histoire est traitée comme un palimpseste dont l’écrivain gratte la surface (l’actualité) pour révéler les catastrophes enfouies. Bien plus qu’une œuvre de circonstances, 11 septembre mon amour est un récit qui se propose de relire et de relier les catastrophes pour établir une « mélopée du souvenir » dépassant les clivages historiques et nationaux.

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12 – Inscription sonore du trauma du 11-Septembre dans le roman étasunien contemporain

Le présent article se propose d’étudier la dimension sonore de la mise en œuvre littéraire des attentats du 11-Septembre dans quatre romans étasuniens. Si l’aspect particulièrement visuel de l’événement et des romans qui lui sont consacrés a déjà été largement exploré, nous postulons ici que l’image est trompeuse, et n’est qu’un mode d’exploration détourné d’un événement qui n’est en réalité jamais directement représenté. Ainsi, à défaut de pouvoir montrer ce qui échappe à toute représentation, le texte donne à entendre : le son vient figurer ce qui demeure inaccessible dans ce que l’on qualifiera d’événement traumatique. Le bruit assourdissant, qui met brutalement fin au silence et à l’innocence, se fait métaphore de l’effraction. Synonyme à la fois de violence, de menace et d’enfermement, il signifie le point de rupture radicale provoqué par la catastrophe. Si les personnages des romans du 11-Septembre sont bel et bien hantés par l’événement, ce n’est pas seulement en raison des images intrusives qui s’imposent à leur esprit malgré eux, littérales et incompréhensibles à la fois ; le texte met en scène le retour de sons obsédants et de voix refusant qu’on leur impose le silence. L’œuvre littéraire est également le lieu où peuvent émerger à nouveau les sons oubliés de l’événement, qui complètent un récit qui menaçait de devenir à la fois partiel et partial. Enfin, accaparés par les bruits parasites qui troublent la communication, les êtres en souffrance adoptent des stratégies de défense variées, cultivent le silence et privilégient les lieux sanctuaires propres au recentrement, ou l’on invite la musique comme un remède, dont le rythme ranime une certaine pulsation vitale à même de contrer la temporalité figée du trauma.

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