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Un passé présent ? Des esprits animaux dans la poésie moderne et contemporaine

Mots clés : Poésie, physiologie, longue durée, matérialisme, René Descartes, Michel Deguy, Bernard Noël. Résumé : Quelle pertinence la notion d’esprits animaux a-t-elle pu conserver dans la poésie française des XIXe et XXe siècles, et par là, dans les mentalités, à une période où le concept avait de longue date perdu tout crédit pour les sciences du vivant ? On tente d’examiner cette question à partir d’un bref panorama de textes s’étalant de la fin des Lumières à la Belle-Époque, avant d’étudier l’exemple de deux poètes contemporains, Michel Deguy et Bernard Noël.

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Le miroir qui décrit. Lecture Neurocognitive de La Jalousie de Robbe-Grillet

Une fenêtre s'ouvre sur le paysage. Elle cadre des scènes humaines. La fenêtre est recouverte d’une jalousie dont les lames cachent partiellement les détails du paysage et des scènes. La vision à travers cette fenêtre possède de nombreux points aveugles – de nombreuses bandes qui empêchent de voir. La profusion de ces bandes incite la description à adopter un fonctionnement rappelant celui de la rétine et son point aveugle (celui où elle entre en connexion avec le nerf optique) : le cerveau remplit cette cécité avec de l’information venant de l’image visuelle des alentours de ce point, tout en cherchant de la cohérence (ainsi que le font les systèmes de photographie numérique actuelle). Mais il arrive parfois que dans le point aveugle l’on puisse voir des images sans relation avec l’entourage et qui seraient dues à d’autres aires cérébrales ; il y a des sujets qui affirment y voir des dessins animés1. Une situation de cet ordre pourrait concerner le regard qui se charge de la description dans La Jalousie : doit-elle remplir les zones aveugles de sa vision ? Et si c’est le cas, comment s’y prend-elle ? Au moyen d’un tissu narratif-descriptif cohérent avec ce qui a été effectivement vu ? Ou au moyen de la description d’images envahissantes qui n’ont pas été capturées par la rétine et qui viennent de quelque région cérébrale ? Les pages qui suivent exploreront les réponses que propose le roman2. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Lanza.pdf

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Une fonction propagandiste de la poésie scientifique à l’aube du XIXe siècle : le Lucrèce français de Sylvain Maréchal (1798)

Afin d’analyser la fonction propagandiste de la poésie scientifique, nous porterons un regard historiographique sur l’ouvrage de Sylvain Maréchal intitulé Le Lucrèce français, poème athée publié en 1798, ainsi que sur l’œuvre qui se situe en amont de ce texte de la Révolution comme de la poésie scientifique occidentale, à savoir le De rerum natura de Lucrèce.

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À PROPOS DES AUTEURS

  Téléchargez l'article au format PDF : À PROPOS DES AUTEURS     Guilhem Armand est Maître de Conférences en littérature française à…

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Le théâtre des opérations promotionnelles de l’institut Benway

Depuis 1950, l’Institut Benway commercialise des organes et des organismes de confort : glande salivaire aromatisée, barrette de mémoire, testicule hallucinogène, chat de synthèse… Commandité pour célébrer le jubilé de ce pionnier mondial des biotechnologies, l’artiste multimédia Mael Le Mée a digéré 60 ans d’archives inédites. Il les restitue sous forme d’installations, de performances et de textes, construisant depuis 2004 un théâtre des opérations Benway, entre simulation et documentaire.

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La poésie scientifique du XIXe siècle : oppositions et réconciliations avec la religion

Au XIXe siècle, la science alimente de nombreux débats et, de manière corrélative, la poésie scientifique est loin d’être neutre. En particulier, la question de la religion et de Dieu revient sous presque toutes les plumes. Traditionnellement, religion et science font mauvais ménage dans les esprits. C’est au point que Jacqueline Lalouette, qui a étudié l’anticléricalisme au XIXe siècle, parle de « sciences de combat » : science des religions, sciences de la terre et sciences de la vie sont avancées pour démontrer l’inexistence de Dieu. L’examen du corpus Euterpe (1792-1939) révèle plusieurs positions relativement à la question religieuse ; comme on s’en doute, bon nombre d’auteurs opposent science et religion. Il est intéressant de confronter leurs arguments à ceux des poètes qui essaient au contraire de les réconcilier.

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Entretien avec Thibault Rossigneux (Compagnie « Le Sens des mots »)

Directeur artistique, metteur en scène, comédien et auteur, Thibault Rossigneux est aussi fondateur de la compagnie Le sens des mots avec laquelle il développe les rencontres « Binômes « entre des auteurs dramatiques et des scientifiques (Festival d’Avignon, Palais de la Découverte, Cité des Sciences, Théâtre du Rond-Point des Champs Elysées).

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Entretien avec Christine Dormoy (Compagnie « Le Grain »)

Christine Dormoy est metteur en scène et dramaturge, fondatrice de la compagnie Le Grain. Elle ouvre des voies théâtrales nouvelles à partir de l’exploration de partitions musicales. La question de la musicalité dans la direction d’acteur et la pratique du chant l’amènent à entreprendre des études musicales au cours desquelles la découverte des partitions contemporaines sera déterminante : elle crée la Compagnie Le Grain. Grâce à un parcours singulier qui intègre l’influence de Peter Brook pour la direction d’acteurs, la pratique de terrain en milieu rural pour la relation aux publics, et la recherche formelle issue des écritures savantes, on voit apparaître, au fil de ses mises en scène, un univers sensible, au « grain » bien reconnaissable. Elle est à l’origine de nombreux spectacles comme Chantier Fabbrica (2014), Cantatrix Sopranica L. (2006), Vertiges (1999).

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Le commerce de la science : poésie scientifique et rhétorique publicitaire

Conservé dans une liasse de brochures à la Bibliothèque Nationale, l’« Hommage à la science » d’un certain François Devillaine est un long poème de quatre-vingt dix vers joliment mis en page, avec une typographie soignée. De son auteur, on sait qu’il était professeur en retraite de l’Université de Toulouse et membre d’honneur de l’Athénée des Troubadours, un cercle de poètes amateurs . Dans le thème, dans le ton, en alexandrins appliqués, ce texte, quoique dénué d’annotation savante, illustre le genre de la poésie scientifique et sa topique progressiste. L’ample exorde s’enthousiasme sur ce XIXe siècle finissant qui, par la volonté de Dieu, aura été celui de la science, et présente une galerie de savants célèbres, Fulton, Ampère, Pasteur. À l’éloge du siècle succède celui d’une découverte merveilleuse, celle du gaz acétylène, carburant extraordinaire dont la « flamme vive » surpasse en rayonnement ses « modernes rivaux ».

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Entretien avec Jean-François Peyret

Metteur en scène et dramaturge, Jean-François Peyret se sert du théâtre pour penser la question du vivant et de la machine, comme dans Le Traité des formes (en collaboration avec Alain Prochiantz), qui eut pour prétexte Ovide (La Génisse et le pythagoricien) et Darwin (Les Variations Darwin). Il s’intéresse aux apports de la science dans la création théâtrale, et interroge la place de la technique dans la culture contemporaine. En 2008, il crée, en collaboration avec Françoise Balibar et Alain Prochiantz, Tournant autour de Galilée, au Théâtre national de Strasbourg et au Théâtre national de l'Odéon. En 2010, à l'invitation de l'Experimental Media and Performing Arts Center à Troy, aux États-Unis, Jean-François Peyret s'empare de la figure d'Henry David Thoreau, comme d'un spectre qui hanterait notre monde technologique. À partir de Walden ou la vie dans les bois, il a proposé des soirées work-shop au Théâtre Paris-Villette en juin 2010, ainsi qu'une installation, Re: Walden, au Fresnoy-Studio national des arts contemporains. La pièce est jouée au Théâtre national de la Colline en janvier 2014. En 2011, il crée la pièce Ex vivo / In vitro, coécrite avec le neurobiologiste Alain Prochiantz au théâtre de la Colline

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Louis Bouilhet et Flaubert. L’invention d’une nouvelle poésie scientifique

Ami de Flaubert, Louis Bouilhet partageait quelques-unes de ses idées esthétiques, en particulier sa conception de l’art pour l’art, de l’impersonnalité de l’écrivain. Hostiles à l’implication du Moi, des sentiments et des opinions dans la littérature, les deux écrivains considéraient la science comme un modèle esthétique à opposer au romantisme. « La littérature prendra de plus en plus les allures de la science », disait Flaubert (lettre à L. Colet, 6 avril 1853). Si, en 1854, Louis Bouilhet dédie à son ami le poème Les Fossiles plutôt qu’un autre poème, c’est sans doute parce que les deux écrivains partagent le même attrait pour les sciences naturelles.

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Entretien avec Vincent Barras

Vincent Barras a fait des études d’histoire, de philosophie et de médecine. Il est aujourd’hui directeur de l’Institut romand d’Histoire de la médecine et de la santé de Lausanne. Il est notamment l’auteur de La Médecine Des Lumières : Tout Autour De Tissot (Georg Editeur, 2001), et d’une Histoire du médecin (avec L. Callebat, P. Mudry et al, Flammarion, 1999), ainsi que de Poésies sonores (Contrechamps, 1993). Il est aussi poète sonore, performer et traducteur. Il a notamment traduit les poèmes d’Eugen Gomringer, père-fondateur de la poésie concrète, et de sa fille Nora. Il a également publié des écrits sur l’art, notamment sur Kandinsky, Adorno et John Cage.

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René Ghil : altruisme et poésie scientifique

Très tôt, René Ghil avait explicitement lié, en poésie, science et morale – soit, plus spécifiquement, la question de la Matière en devenir et celle de l’altruisme –, donnant à l’ultime partie de Dire du Mieux (premier des trois grands cycles constitutifs de l’Œuvre) le titre programmatique de : L’Ordre altruiste. L’articulation entre ces deux concepts demeure problématique, et devra être examinée – dans le contexte de l’époque – à la lumière des théories évolutionnistes, mais aussi de l’évolution sociale et idéologique. Mais, qui fut René Ghil ?

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Le surréalisme en équations

Les rapports entre le surréalisme et la science sont éminemment paradoxaux. Mais repenser ces liens par le biais de la question de la « poésie scientifique » permet de déjouer les contradictions des discours des membres du mouvement surréaliste afin de retrouver, au cœur même d’une poétique fondée sur le hasard objectif, l’onirisme et la folie, quelque étincelle de rationalité des plus logiques.

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Ouvroir de littérature virtuelle. Cent mille milliards de poèmes : avatar de la poésie scientifique ?

Le recueil Cent mille milliards de poèmes de Raymond Queneau est précédé d'une citation d’Alan Mathison Turing, mathématicien et informaticien anglais considéré comme l’un des créateurs de l’ordinateur : « Seule une machine peut apprécier un sonnet écrit par une autre machine. » Une telle proposition n'est pas sans rappeler le côté ludique qui caractérise l'écriture de Queneau, mais elle ne doit cependant pas être uniquement interprétée comme telle, car ce recueil est véritablement une machine à fabriquer des poèmes : dans cette œuvre, dix sonnets se superposent sur dix pages selon un système où chaque vers est placé sur un volet, permettant ainsi au lecteur des entrées multiples, transversales et exponentielles. Les cent mille milliards de combinaisons possibles créent les cent mille milliards de poèmes du recueil, lequel nécessiterait plus d'un million de siècles de lecture « en comptant 45 secondes pour lire un sonnet et 15 secondes pour changer les volets, à 8 heures par jour, 200 jours par an . »

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Le Chant du styrène

Le monde industriel n’a pas que des secrets, il recèle aussi d’insondables mystères. Un exemple amusant est celui du Chant du styrène. Un cadre de Péchiney en eut l’idée. Il la vendit à son conseil d’administration, qui crut qu’il s’agirait d’un film publicitaire, à la gloire de la société. Mais ce monsieur engagea Alain Resnais comme réalisateur. Resnais visa un film de vulgarisation, pas de propagande pour une image de marque — première subversion. Quand Resnais, après avoir tourné le film, recruta Queneau pour en écrire le commentaire, il tablait sur sa réputation de poète scientifique découlant de sa Petite cosmogonie portative, et sur son expérience du cinéma, dont, entre autres, un documentaire sur l’arithmétique. Resnais mettait ainsi en place une seconde subversion, par l’humour.

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Francis Ponge : la méthode poétique

L’idée d’une poésie scientifique évoque une sorte de paradis perdu, une tour de Babel des connaissances qui se serait plus ou moins effondrée avec les présocratiques, pour qui l’union de la poésie et du savoir allait de soi. Cette alliance ne s’est toutefois jamais complètement dénouée, et c’est aux XVIIIe et XIXe siècles que la poésie scientifique connaît son apogée, en raison notamment des développements de la science et de l’idée de progrès qui s’y greffe. Si le genre était déjà en grande partie dissout au XXe siècle, il n’en demeure pas moins que science et poésie ont continué de s’influencer, souvent de façon allusive, parfois avec dérision. Parmi les légataires de cette tradition, la figure de Francis Ponge est exemplaire : non pas parce qu’il incarne au mieux la survivance de la poésie scientifique, mais plutôt parce que son œuvre souligne les apories de cette pratique et qu’elle rend compte de ses transformations.

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Éviter l’obstacle cognitif : changements de paradigme et écriture augmentée

J'essayerai ici d'esquisser certains enjeux théoriques qui me tiennent à cœur, issus de la rencontre entre ma propre production poétique et de récents développements scientifiques et technologiques. En 2009 j’ai publié un e-book trilingue (italien, français et anglais), intitulé da 1000m – dès 1000m – from 1000m , qui contient des textes poétiques tirés d'articles de biologie marine sur les créatures des abysses. L’idée de ces textes, en grande partie intégrés depuis à ma dernière publication, Redéfinition, m'était venue d'un ouvrage paru en 2006 : The Deep . Claire Nouvian y présente d'étonnantes photos de créatures des abysses récemment (re)découvertes grâce aux nouvelles technologies de descente dans les profondeurs océaniques et de captation photographique de sujets se trouvant dans un noir presque absolu. Parmi les caractéristiques principales de ces créatures il y a le changement d'échelle par rapport à des animaux semblables mais plus communs (par exemple de nombreux types de méduses de dimensions gigantesques ). Autre caractéristique majeure, leur biolumi-nescence .

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Le « corps » des sciences et le « cerveau » de la poésie : quelques réflexions sur la poésie scientifique de Botho Strauss et Durs Grünbein

Dans les années quatre-vingt-dix, les neurosciences ont pris un caractère paradigmatique qui leur a permis de renouveler nos conceptions des rapports entre corps et esprit, mémoire et imagination, conscience et subjectivité. Dans un contexte de naturalisation de la connaissance, leur impact s’est manifesté bien au-delà des frontières de la science, notamment dans le domaine de l’esthétique dont elles ont contribué à redessiner le paysage et à reconceptualiser certains thèmes fondamentaux. Cette évolution a favorisé l’émergence de nouvelles disciplines, comme la neuroesthétique, mais aussi de nouvelles formes poétiques qui mobilisent les ressources du neuronal pour comprendre leur propre mode d’émergence et leur effet sensible sur le lecteur.

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Savoirs, littérature et théories de l’analogie (dans la Petite Cosmogonie portative de Queneau et Palomar de Calvino)

"The study of grammar, in my opinion, is capable of throwing far more light on philosophical questions than is commonly supposed by philosophers. Although a grammatical distinction cannot be uncritically assumed to correspond to a genuine philosophical difference, yet the one is primâ facie evidence of the other, and may often be most usefully employed as a source of discovery.” Bertrand Russell The Principles of Mathematics, Cambridge, 1903, p. 42.

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