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The Romantic Vision of the Unity of Science and Poetry and the Institutionalization of Science in England

The period of English Romanticism, from the last decade of the 18th century to the 1820s, was a time when the scientific education and researches began to be systematized. The foundation of the British Association for Advancement of Science (BAAS) in 1831, was actually a claim against the old regime of the Royal Society whose members consisted largely of amateur gentlemen of science. The BAAS declared that they would choose members according to their merits, while organizing annual conferences throughout the United Kingdom. William Vernon Harcourt, founder of the BAAS, claimed that the aim of the organization was "to give a stronger impulse and more systematic direction to scientific inquiry (Morrell, 70)”, and to develop human networks through scientific knowledge.

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Les lettres, les sciences, les barbares. Questions sur une controverse de 1816

Dans un discours prononcé en 1821 lors de la très solennelle et médiatisée « séance publique annuelle de l’Institut », l’érudit Charles Athanase Walckenaer exhume un projet académique vieux de plus d’un siècle et qui ne vit jamais le jour. Devant l’ensemble de ses confrères académiciens, il rappelle l’idée louis-quatorzienne de « ce corps [qui] devait être nommé l’Académie universelle, ou la grande Académie »1 et dans lequel auraient harmonieusement cohabité les compétences les plus variées. Selon Fontenelle, que cite Walckenaer, cette Académie rêvée devait compter « tout ce qu’il y aurait de gens les plus habiles en toutes sortes de littérature : les savants en histoire, les grammairiens, les mathématiciens, les philosophes, les poètes, les orateurs devaient être également de ce grand corps, où se réunissaient et se conciliaient tous les talents les plus opposés »2. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Zekian.pdf

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HISTOIRES DU VIVANT ; SAVOIRS DU CORPS : SIRI HUDSVEDT, THE SHAKING WOMAN, PAUL AUSTER, CHRONIQUE D’HIVER ET PENNAC, JOURNAL D’UN CORPS

La biographie et l'autobiographie depuis une quinzaine d'années se focalisent essentiellement sur le corps et la dimension vivante du sujet. Pensé comme l'agent essentiel et l'élément déterminant de la vie d'un individu, il donne tantôt lieu à des « autopathographies » dans le cas de récits de maladies, tantôt à une observation minutieuse des sensations et des impressions corporelles comme rythme propre de l'expérience. Le récit du corps – supposé muet – occupe donc le devant de la scène dans La Femme qui tremble de Husvedt, Journal d'un corps de Pennac et la Chronique d’Hiver d'Auster ; ces textes réhabilitent le récit dans la compréhension du corps vivant, et comme manière de capter ce qu'a de spécifique le vivant, mouvant et dynamique. Entrelaçant vécu émotionnel et dimension savante, ces récits troublent la hiérarchie des discours. Cependant, ce corps, loin d'être familier, est constamment mis à distance. À la fois intime et étranger, il questionne l'identité, la mémoire, notre rapport politique même avec nos caractéristiques biologiques et ethniques. Ce paradigme nouveau du récit de vie, qui n'est pas seulement un « thème » littéraire, contribue enfin à une approche critique du discours biomédical. En niant, dans la tradition de Canguilhem, la pertinence du recours à la norme, le corps se définit comme forme de vie, savoir de la singularité et de la particularité, et non plus science du général. Mots-clés : autobiographie, récit du corps, discours biomédical, savoir du corps

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Poésie de l’invention : rôle et discours de la poésie dans l’invention au XIXè siècle

Si la mise en mots de l’invention repose souvent sur des lettres, demandes de brevets et de financement, brochures descriptives, qui toutes relèvent du registre de la communication, la littérature a également contribué au XIXe siècle à la diffusion d’une science rendue visible par ses réalisations techniques, et qui se réaffirme comme proprement humaine en mettant en scène le moment de l’invention. Dans les publications de ce siècle, l’invention technique est en effet portée par deux séries d’œuvres distinctes selon qu’on parle prose ou poésie. D’un côté (et principalement) les œuvres en prose, abondantes et variées, déclinent volontiers l’invention suivant les deux modèles génériques de la biographie et du répertoire d’inventions et découvertes. Parallèlement, persiste une poésie de forme savante qui, sans être nécessairement l’œuvre d’écrivains de profession, s’adresse à un public manifestement plus éduqué et rare : cette poésie scientifique est une pratique constante et également répartie sur le territoire, jusqu’à la fin du XIXe siècle, et participe de ce fait à une forme de dissémination des thématiques scientifiques.

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Le Théâtre, la Peste et le Choléra. Une thèse de médecine au temps de Lorenzaccio

Le samedi 9 mai 1834, la Gazette médicale de Paris (Gazette de santé et Clinique des hôpitaux réunis), revue hebdomadaire essentiellement destinée au corps médical, publiait dans la rubrique « feuilleton » le copieux compte rendu d’une thèse de médecine soutenue le 25 janvier de la même année par un certain H. Bonnaîre, originaire de Saint-Mihiel, dans la Meuse. Le titre du mémoire de fin d’études avait de quoi étonner : Influence du Théâtre sur la santé Publique. Entre ironie et éloge – feint ou réel -, le chroniqueur estime que « l’auteur ne pouvait choisir un thème plus favorable au déploiement de l’imagination. C’est une vraie bénédiction qu’un pareil sujet pour ces esprits inventifs qui aiment à s’écarter des sentiers battus et prendre la science par son côté original. » Après avoir fait allusion aux progrès médicaux de l’époque, la thèse expose une théorie de l’imagination émotionnelle, ou de l’émotion imaginante. Elle reprend à son compte la théorie de l’excitabilité érotique. Le monde imaginaire du théâtre nouveau enflamme les sens, et conduit à l’excès masturbatoire ou copulatoire, antichambre de la maladie et de la mort. L’intérêt du document est de montrer l’intrication de ses fondements qui relèvent aussi bien de l’histoire du théâtre, qu’à celle de la médecine et du catholicisme français.

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Observer à partir des collections d’histoire naturelle au XVIIIe siècle. Le dialogue des objets au sein du cabinet de Jean Hermann

Pour le naturaliste strasbourgeois Jean Hermann (1738-1800), les collections constituent le dispositif matériel indispensable à la pratique de l’observation. Le savoir relève de trois types de collections réunies dans son riche cabinet d’histoire naturelle : les spécimens naturels, les images et les livres. Si tous contribuent à la mise en visibilité de la nature, Hermann s’attache à mettre en avant leurs relations. Il établit la supériorité des spécimens naturels sur les autres objets qui sont considérés comme des « spécimens de substitution ». Le « Catalogue des dessins d’histoire naturelle » montre pourtant l’importance accordée aux images dans le travail scientifique. Ces relations hiérarchiques sont contrebalancées par un « dialogue des objets » mené à différentes échelles : entre les objets d’une même catégorie, entre les spécimens et leurs substituts et entre les substituts. Le dialogue le plus complexe – opéré entre les choses, les images et les mots – définit une nouvelle épistémè visuelle.

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Material-cerebral plasticity, fluid ontology: the case of animal spirits

Abstract Animal spirits – the messengers of the body, as Mandeville called them – cross domains such as neuroscience, literature, culture, and economics. Additionally, they are not a neutral concept. On the one hand, the history of neuroscience tends to claim that it was the abandonment of animal spirits which allowed experimental neuroscience to emerge. In contrast, more culturally oriented historians of ideas see the spirits as 'freed' from a linear scientific development, as agents of fluidity and dynamism, whether strictly as regards models of the brain and nervous system, or of matter and life overall. Animal spirits then seem to be a key case, or at least a particularly vivid case which calls for ‘historical cognitive science’ analysis or ‘historical neurophilosophy’, as some have proposed. For they testify to a tension between two models of the brain, both at the time of Willis et al., and now: a more mechanistic picture of brains (the brain is a mere lump of inert substance and/or a fully mechanistic system) and a more dynamic picture of the brain as self-transforming and malleable (plastic, in current parlance), as I have described elsewhere with reference to Diderot’s image of the brain as a ‘book which reads itself’. In this paper I seek to reconstruct this dynamism and to show how it related to a dynamic form of materialism. Keywords – mots-clés Matérialisme, cerveau, plasticité Materialism, brain, plasticity

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L’histoire d’une histoire : reprise, diffusion et abandon d’une découverte botanique et poétique

Peu de végétaux fascinèrent autant les botanistes que la vallisnère ou vallisneria spiralis, en raison d’une particularité décrite au XVIIIe siècle par l’Italien Pier Antonio Micheli, puis par Linné, qui y vit un admirable exemple de la providence naturelle1. Cette plante subaquatique, qui pousse dans le lit de fleuves comme le Rhône, mais utilise le vent pour sa reproduction, met en contact de façon différenciée ses fleurs mâles et femelles, portées par des individus distincts. Pour gagner l’air libre, les premières se détachent entièrement du pied, tandis que les fleurs femelles restent arrimées à une longue spire, qui ramène l’organe sous la surface des eaux après fécondation. La vallisnère offre ainsi un cas de mobilité végétale qui frappa ses premiers descripteurs autant pour sa complexité que parce que, comme celui de la sensitive, ce « mouvement propre réel2 » semblait rapprocher la vallisnère du règne animal, pour en faire un « intermédiaire entre la plante et l’insecte », voire prouver chez les végétaux l’existence d’une « intelligence liée à la vie3 » ou d’un « instinct amoureux4 ». Aussi les savants des Lumières n’abordent-ils guère la vallisnère sans faire part de leur surprise, ni chercher à communiquer cette stupeur à leurs lecteurs. Picot-Lapeyrouse, par exemple, explique en 1799 qu’un « mécanisme aussi singulier » constitue un vrai « miracle de la nature », une « extraordinaire », « prodigieuse » et « merveilleuse » cause d’« étonnement5 ». Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Marchal.pdf

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« Shapeless dead creatures … float[ing] in yellow liquid » : Dissection, Exposition et Traitement du Système Nerveux dans Armadale de Wilkie Collins

Résumé : Le roman à sensation, littérature populaire de l’Angleterre victorienne qui naît dans les années 1860, est un genre qui…

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Bloody Poetry: On the Role of Medicine in John Keats’s Life and Art

To see Keats only as yet another British Romantic poet, author of the odes and the Hyperions, who died in exile, after one last fit of tuberculosis, is to forget that he spent as many years – six years to be precise – of his short life studying medicine as he did writing poetry. First a young apprentice to an apothecary, then a medical student from 1811 to 1816, Keats chose to start his career as an artist without completely burying his scientific past, making sure never to get rid of his old books on medicine – these books that were to previously shape his intellect before he even started putting together his collections of poems. Satisfied to have had the ability to distance himself from a rather contrasted form of education in order to favour a unified conception of knowledge, Keats will always seem to go back to those first readings as a source of reference.

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MOTU CORDIS: LA FIGURE DU CŒUR TARDIF

Le vaste corpus théorique et artistique qui compose celui que l’on appelle « l’archive cardiographique » (Derrida), trouve, dans le cœur tardif – pensé à partir d’une dérivation du « style tardif » (Adorno, Saïd) – une figure de ses possibles et de ses limites. La tradition cordiale est formée par une archive qui réunit – et à titre d’exemple – aussi bien le traité Exercitatio anatomica de motu cordis et sanguinis de William Harvey que l’installation artistique The Boundary of Life is Quietly Crossed, de Dario Robleto. Dans cet article, en prenant appui sur le recueil de poèmes Fibrilaciones, d’Ana Hatherly, et sur l’essai critique et clinique L’Intrus, de Jean-Luc Nancy, l’on met à l’essai la valeur d’une réflexion sur l’inhumanité du cœur humain, tout en révisant également certaines figurations cardiocentriques du « corps utopique » (Foucault). Mots-clés : cœur intrus, coeur tardif, coeur sans battement

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Tarde. Inventions : Duel et accouplements

Le thème et l’enjeu social de l’invention a pu paraitre un thème désuet tant que la sociologie s'occupait de la reproduction et des mécanismes par lesquels les pratiques autant que les institutions reconduisaient, en vertu de principes structuraux, l’ordre social. Tout vif de l’évènement créatif finissait subordonné au mort de la structure. Les initiatives et alternatives sociales, les échappées et les ruptures étaient reconduites aux significations des intérêts de classe, reconduites aux différences d’éthos entre classes. Dans un livre collectif du début des années 80 et décisif pour la critique de la sociologie de Pierre Bourdieu, Jacques Rancière posait à la sociologie cette question : « comment le nouveau est-il possible en général ?» ; se demandant si la sociologie peut penser l’étrangeté démocratique ou seulement son deuil ? Les transformations récentes dans l’économie, la politique et l’activité démocratique ont sérieusement ébranlé les certitudes scientifiques du structuralisme de la reproduction sociale et c’est peut-être une des raisons pour lesquelles il faut revisiter Gabriel Tarde alors que persistent, pugnaces, les interrogations sur les raisons de le lire et sur la « tardomania » qui depuis bien une vingtaine d’années se serait emparée de certains esprit.

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Alfred Binet, un psychologue au Grand-Guignol : médecine sous influence et masques de l’hystérie dans Une leçon à la Salpêtrière

En s’associant à André de Lorde, prestigieux auteur pour le Grand-Guignol, le psychologue Alfred Binet règle ses comptes avec Charcot dans Une leçon à la Salpêtrière (1908). Sa connaissance de l’hypnose en milieu hospitalier lui fait montrer la médecine comme une science expérimentale pervertie, qui s’offre le spectacle de sa propre puissance en exploitant l’histrionisme de prétendues hystériques. Parodie de traitement, maladie théâtrale ; la scène du Grand-Guignol paraît elle aussi trop éprise de ses effets pour dénoncer pleinement la théâtralité

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L’impression naturelle : vérité de la nature, beauté de la création et techniques de reproduction de l’image entre le XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle

L’impression naturelle est une technique de production par contact d’un spécimen botanique. La feuille préparée est immergée dans de l’encre et imprimée sur du papier. L’usage de ce procédé, spécialement dans l’Allemagne du XVIIIe siècle, s’inscrit dans une discussion sur les limites de la reproduction de la complexité de la nature par la main de l’artiste et témoigne de l’intérêt des savants pour l’anatomie des plantes. La reproduction de la nature par elle- même, tout en affichant des valeurs qui annoncent l’émergence d’une nouvelle place de l’objectivité dans la pratique scientifique, s’inscrit dans une tradition de l’image différente de celle que reconstituent Lorraine Daston et Peter Galison (Objectivity, New York, Zone Books, 2007), dont le paradigme semble se trouver dans la vera-icon. Cet article traite des usages de cette technique d’impression dans la botanique du XVIIIe siècle et montre comment la feuille se déplace, au cours du XIXe siècle, du domaine de l’objet scientifique à celui du dispositif technique voué, par la complexité de sa nervation, à prouver la qualité des techniques de production de l’image comme l’impression naturelle ou le dessin photogénique.

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Sur les traces des esprits animaux Lecture anachronique d’une métaphore psychophysiologique entre Nicolas de Malebranche et les sciences du cerveau contemporaines

Résumé Dans la longue histoire des « esprits animaux », la métaphore de la « trace » a été pour un temps une puissante ressources explicative pour rendre compte d’une variété de phénomènes de l’esprit dont les causes matérielles étaient inaccessibles à l’expérience. Inspiré par l’étude des métaphores proposée par Hans Blumenberg, ce bref essai décrit la parenté surprenante entre la métaphore de la trace chez Nicolas de Malebranche et celle revenue sur l’avant-scène de la neurophysiologie contemporaines de la mémoire, deux moments séparés par la longue éclipse que lui imposa la philosophie empiriste et la science expérimentale. Le pivot de cette courte enquête aux allures anachroniques est la récurrence entre deux contextes si contrastés d’une interrogation partagée sur le fonctionnement de l’esprit qui puisse allier philosophie du sujet et physiologie du cerveau.

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Récits de mathématiques : Galois et ses publics

Tout cela étonnera fort les gens du monde, qui, en général, ont pris le mot Mathématique pour synonyme de régulier. Toutefois, là comme ailleurs, la science est l'œuvre de l'esprit humain, qui est plutôt destiné à étudier qu'à connaître, à chercher qu'à trouver la vérité […]. En vain les analystes voudraient-ils se le dissimuler, ils ne déduisent pas, ils combinent, ils comparent ; quand ils arrivent à la vérité, c'est en heurtant de côté et d'autres qu'ils y sont tombés.1 Les mathématiques sont souvent présentées comme un langage. Qu’ils les considèrent comme provenant d’un autre monde, le monde des « idées pures »2, ou comme le « langage commode » donnant accès à l’ « harmonie interne du monde »3, de nombreux discours sur les mathématiques s’organisent autour d’une distinction entre ces dernières et le « monde », au sens de ce qui se situe hors du langage. C’est à de tels discours de démarcations que nous consacrons cet article. Notre objectif n’est cependant pas de déconstruire ces discours du point de vue de l’histoire sociale4, ou de traiter des problèmes épistémologiques posés par des distinctions entre logique et intuition ou abstraction et expérience. Nous envisageons plutôt ces discours de démarcation en tant qu’ils forment des récits dont nous souhaitons saisir certaines modalités de construction et d’évolution. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Breschenmacher.pdf

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Poésie et médecine au XIXe siècle. Les traductions françaises de Syphilis (1530) de Fracastor

Dans l’histoire de la poésie scientifique, le médecin véronais Jérôme Fracastor, né vers 1478 et mort en 1553, apparaît comme une figure tutélaire grâce à la publication en 1530 de Syphilis, sive morbus gallicus. Le chant III de ce poème en hexamètres latins présente le cas d’un berger nommé Syphilus, frappé d’un mal nouveau en guise de punition pour avoir insulté le soleil. À la faveur de ce récit, Fracastor donne la description de la maladie qui s’appellera dorénavant la syphilis. Il en dresse les symptômes et en détaille la thérapeutique, en particulier la sudation obtenue par la décoction d’un bois exotique, le gaïac.

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STRUCTURE ET FONCTIONS DES THÉORIES SCIENTIFIQUES : POUR UNE THÉORIE (SCIENTIFIQUE) DE LA LITTÉRATURE

Cet article propose une description des proprités élémentaires que la théorie scientifique doit posséder (cohérence, économie, beauté, etc.), et parcourt ensuite le domaine des études littéraires à la recherche d’un certain nombre d’exemples d’absorption réussie de ces propriétés dans la théorie de la littérature contemporaine (la théorie empirique de S. J. Schmidt, la sociologie du champ littéraire de P. Bourdieu, la sémiotique narrative et discursive de l’École de Paris, etc.). Le but de ce parcours n’est autre que la promotion d’une rationalité transversale aux trois cultures, celle des sciences naturelles et formelles, celle des sciences sociales et celle des humanités, même au risque de secouer les assises ordinaires des études littéraires dans la tradition herméneutique. Mots-clés : S.J. Schmidt, P. Bourdieu, sémiotique

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La théâtralité, un lieu psychique pour penser l’énigme

Freud a sans cesse maintenu la référence théâtrale vivante, productive et d’une actualité psychique remarquable. Il fit de cette référence une métaphore centrale de son œuvre. Nous partirons de là pour cerner le pouvoir cathartique et la valeur énigmatique de ce qui, dans un cadre thérapeutique, peut devenir expérience du sujet. Un sujet qui, dans le cadre de la psychose, est bien souvent destitué et cherche néanmoins à (re)ssusciter des figures fantomatiques qui, jusqu’alors, l’habitaient à son insu. La théâtralité, paradigme m’aidant à penser la psychose, se conjoint à ce travail de réanimation psychique et permet du même coup de faire advenir ce que Pirandello nommait des « personnages en quête d’auteur ».

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Entre art et science : dessins et méthodes de visualisation dans l’œuvre viatique d’Alexander von Humboldt

Alexander von Humboldt est connu comme l’auteur de Cosmos et des Tableaux de la Nature, le « deuxième explorateur des Amériques » et l’acteur d’un « arpentage du monde » ayant donné lieu à de très nombreux écrits savants et viatiques. On connaît moins les talents de dessinateur et d’illustrateur de ce naturaliste. Ses écrits contiennent en effet plus de 1500 illustrations. En tant qu’ethnologue, il a réalisé des esquisses d’hommes, de bâtiments et d’objets du quotidien. Le botaniste, zoologiste et anatomiste a effectué des dessins de plantes, d’animaux et de détails corporels. Le géologue, géographe et cartographe, enfin, a saisi les profils des montagnes, des étendues d’eau et des continents. Les œuvres graphiques de Humboldt possèdent une fonction épistémique et esthétique. Il a ainsi développé des formes diagrammatiques afin de visualiser les résultats de ses recherches. Ses représentations, aussi précises qu’artistiques, ont influencé toute une génération de peintres paysagistes. Dans les images de Humboldt, la science se transforme en art et l’art en science.

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Retour sur le pouvoir de l’imagination des femmes enceintes

Résumé : Dans le chapitre que Malebranche consacre à l'imagination dans la Recherche de la vérité, il établit le lien entre la diversité des esprits animaux et l'importance des facteurs physiologiques externes, en soulignant la « délicatesse » des fibres de la femme. En effet, Malebranche distingue deux causes physiques du dérèglement de l'imagination : l’une physiologique porte sur la délicatesse des fibres du cerveau et touche tout particulièrement les personnes vulnérables et fragiles. L’autre est le fait des esprits animaux, ces corpuscules vaporeux qui partent du cerveau pour aller dans les nerfs et sont à l'origine de nos impulsions psychologiques. Soixante-dix ans plus tard, Maupertuis dans le chapitre XV de la Venus Physique (1745) reconnaît l'impact de l’imagination mais n'admet pas la ressemblance entre ce qui cause la passion (bonne ou mauvaise) et l'effet qui en résulte sur le corps de l'enfant. Entre ces deux textes, une littérature dite « populaire » s'est emparée de cette croyance selon laquelle l'imagination de la mère peut marquer, au sens propre, le corps de l'enfant jusqu'à expliquer la monstruosité de certains corps. Cette littérature a réinvesti l'instrument épistémique des esprits animaux de manière différenciée : de sa reprise fidèle à son absence assumée, c'est toute une palette explicative qu'il convient de retracer. Si l'explication de ces empreintes sur le corps de l'enfant convoque traditionnellement une réflexion sur le déséquilibre des humeurs, elle est aussi l'occasion d'analyser de manière quasiment ethnographique un fantasme devenu lieu commun, celui d'une supposée « théorie populaire de l’hérédité ». L’enjeu de ce chapitre est de revenir en amont du partage entre culture savante et culture populaire et de montrer à travers l'analyse de textes savants publiés dans les premières années du XVIIIe siècle et d'articles du Journal des sçavans l'intrication entre fantasmagories fictives et discussions théoriques serrées sur la théorie malebranchiste de l'imagination. Mots clefs : Malebranche, imagination, esprits animaux, traumatisme in utero, passions, empreinte.

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Le dérangement des esprits animaux dans les troubles du sommeil aux XVIIe et XVIIIe siècles

Résumé : La théorie des esprits animaux pour expliquer les causes du sommeil connaît un très grand succès au cours du XVIIIe siècle. Pour beaucoup de médecins et de philosophes, il n’y a aucun doute, la cause véritable du sommeil, c’est l’arrêt, la retenue et la détention des esprits animaux dans le cerveau fatigué par le labeur de la journée. Sans le mouvement continuellement assuré par les esprits animaux, le corps humain ne peut produire aucun déplacement. Le repos des esprits est donc fondamental. Néanmoins, la machine corporelle se détraque parfois et les esprits animaux sont alors incriminés. Les curieux qui s’intéressent alors aux troubles du sommeil doivent interroger leurs connaissances et essayer de déterminer le rôle que jouent les esprits animaux lors des crises d’insomnie et de somnambulisme. En fait, chez la plupart des contemporains qui les ont commenté, le diagnostic est simple : les esprits animaux qui devraient se reposer et se fortifier (principe naturel de l’alternance jour-nuit et veille-sommeil) sont tout simplement dérangés. Mais, le plus dur reste à comprendre : qu’est-ce qui conditionne cette altérité et quelles sont les causes profondes de ce dérèglement ? Pour l’insomnie, les explications ont été identifiées et diffusées dans quelques traités de médecine (Ettmüller, Chomel, …) et il convient avant tout de maîtriser la forme de l’insomnie en observant sa durée et sa récurrence. De plus, ce qui agit sur les esprits animaux n’est pas uniquement physique, mais aussi moral. Pour le somnambulisme, les sources sont plus rares, même s’il devient un objet de curiosité au début du XVIIIe siècle. Une des approches les plus classiques, celle du médecin d’Avignon Gastaldy (1664-1747), iatro-mécanicien convaincu, permet de voir que le somnambulisme a été traité comme une activité liée à la passivité du rêve, ce qui permet à Gastaldy de mieux faire accepter les « fuites d’esprits animaux » à l’origine des mouvements inhabituels du corps. Mots-clefs : esprits animaux, insomnie, somnambulisme, troubles du sommeil

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Pour une sociologie des poètes scientifiques au XIXe siècle

La poésie scientifique peut être considérée comme un genre littéraire, et l’on peut faire l’histoire d’un genre littéraire, un peu comme le naturaliste décrit l’évolution des formes de vie sur la terre, l’apparition d’une espèce, son adaptation à divers milieux, sa cohabitation avec d’autres espèces, les relations de concurrence, de symbiose, voire d’hybridation, puis finalement le déclin et la disparition, plus ou moins tragique, plus ou moins regrettée, de cette espèce. Ferdinand Brunetière, parmi d’autres, avait suggéré la parenté possible entre l’histoire littéraire et le discours évolutionniste . Une telle analogie aurait sans doute son intérêt et il faut reconnaître qu’elle aurait au moins le charme de présenter le genre de la poésie scientifique comme doté d’une vie, d’une existence propre . On se prendrait à croire que la poésie scientifique existe parce qu’un hasard, et tout à la fois une nécessité, naturels lui ont donné la vie, à un moment et dans un milieu donnés, avant de la lui reprendre. Pourtant, il n’en est pas de la poésie scientifique comme des dinosaures, des dodos, et des ours bruns des Pyrénées.

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POÉTIQUES DE LA DEUXIÈME PERSONNE POUR L’ÉPOQUE DE LA REPRODUCTION TECHNIQUE

Bruno Latour, l’anthropologue et sociologue de la science, a théorisé plusieurs fois sur l’hybridation des choses, les espaces et l’identité. Les choses permettent que les inscriptions soient publiques de telle sorte que la re-présentation soit possible (ou dans son propre jargon particulier, re- inscription est le passage d’inscriptions d’espace à espace). Les collections, échantillonnages, ameublements de maison, les archives et bibliothèques, les musées, les laboratoires, les réseaux numériques et les bases de données sont des conditions qui ne sont ni au-dessus ni en dessous de la nature sociale des productions culturelles. Dans la culture, les espaces, les artéfacts et les communautés sont inextricablement liés et constituent les différentes formes d’identité qui caractérisent nos expériences. Les identités dont il est question dans cet article sont des identités épistémiques et esthétiques, tout particulièrement esthétiques (bien que les concepts qui émergent de presque tout ce que nous pourrions dire sur les identités esthétiques sont bien applicables aux identités épistémiques). Nous comprenons ces identités comme des groupes sociaux qui sont normativement organisées autour de certaines propriétés qui, dans le premier cas sont des propriétés esthétiques et, dans le second cas, sont des propriétés épistémiques (c’est-à-dire, ce sont des groupes qui sont organisés, respectivement, dans les sphères de l’histoire de l'art et de la littérature ou dans les domaines de l’histoire de la connaissance dans ses différentes disciplines académiques). Mots-clés : Bruno Latour, identités épistémiques, identités esthétiques

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Théâtres de l’espace mental : maladies et troubles psychiatriques sur la scène contemporaine

Ces dernières années, Sarah Kane, Martin Crimp, Gildas Milin, et la dramaturge italienne Francesca Volchitza Cabrini ont mis en scène des personnages atteints de maladie psychiatrique et interrogé leur rapport à l’institution médicale, fondant ce que Solange Ayache appelle une « psychopoésie » dit la gravité du malaise qui hante l’individu en ce début du XXIème siècle, tout en explorant la nature et les limites de l’humain poussé dans des situations psychologiques extrêmes. Cette étude interroge un théâtre de l’espace mental et du traumatisme, où les voix en scène se caractérisent par l’instabilité pathologique d’identités brouillées et de personnalités fracturées, qui questionnent en profondeur la définition et le fonctionnement du personnage de théâtre sur la scène contemporaine. Les objets, discours et pratiques de la psychologie, de la psychiatrie, de la psychanalyse et des psychothérapies depuis le début du vingtième siècle à nos jours tendent à être récupérées, dramatisées et poétisées dans des textes de théâtre ultra contemporain. Dans le théâtre d’aujourd’hui, la pathologie mentale de la femme anonyme remplace la folie cataclysmique du roi Lear ; l’insertion d’objets empruntés à la psychiatrie et à la psychologie clinique supplante l’élaboration psychologique de personnages dramatiques traditionnels. Quel traitement poétique et théâtral ces écritures de la scène européenne font-elles de la subjectivité pathologique constituée en objet dramatique ?

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Le conte fantastique d’E.T.A. Hoffmann (1776-1822) à la lumière de Théophile Gautier (1811-1872)

Le narrateur hoffmannien fixe arbitrairement une réalité qu’il n’a de cesse de transgresser. Il s’applique à mystifier son lecteur en établissant avec lui une complicité illusoire : il le déroute et le plonge dans une hétérogénéité à la fois narrative, discursive et thématique. La réalité côtoie alors le rêve, l’inconscient et la folie. Le merveilleux se mue en un univers fantastique et l’écriture, placée sous le signe de l’ambiguïté et de la distanciation ironique, devient le terrain propice aux hallucinations en tous genres. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Lacheny.pdf

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