proses de l'inventeurProses de l’inventeur. Ecrire et penser l’invention au XIXè siècle
Textes réunis par Muriel Louâpre

Détrôné au siècle suivant par le savant-chercheur, l’inventeur n’est pas encore au XIXe siècle ce spécimen loufoque qui prêtera à rire dans les futurs concours Lépine. Au contraire, la France postrévolutionnaire voit le sacre de l’inventeur comme figure d’exception, dont la légitimité a été renforcée par l’essor des sociétés d’émulation et la mise en place des systèmes de brevets, maillon indispensable entre l’invention et le capitalisme naissant. La création de la Société des inventions et découvertes composée « d’inventeurs, de savants, d’artistes et d’amateurs […] sans prééminence entre ces quatre classes » comme l’annoncent en 1790 ses statuts, a préparé et facilité l’adoption d’une loi « relative aux découvertes utiles et aux moyens d’en assurer la propriété à ceux qui seront reconnus en être les auteurs », première pierre de notre législation sur les brevets. La monarchie de Juillet va également favoriser l’invention, notamment avec la loi de 1844 qui facilite le dépôt de brevet, puis la fondation en 1849 par le Baron Taylor de l’Association des Inventeurs et Artistes Industriels, qui marque le glissement vers un monde de l’invention divisé entre arts appliqués et mécanique, incluant désormais les ingénieurs. Le premier XIXe siècle est donc particulièrement attentif à l’inventeur, rouage précieux du nouveau système capitaliste ; c’est le temps des David Séchard, à la fois synthèse et référence d’un inventeur idéaliste sorti du rang, et au service du bien commun. Plus loin dans le siècle, en 1867, un pamphlet d’Yves Guyot défend explicitement un idéal de l’inventeur héraut de la société démocratique et républicaine, et constitue de ce fait un marqueur dans la construction médiatique cette fois du personnage d’inventeur.

couverture-imageThéâtre et médecine.
Etudes réunies par Florence Filippi et Julie de Faramond
Cet ouvrage réunit les actes du colloque international « Théâtre et Médecine » organisé à la Faculté de Médecine de l’Université Paris Descartes en 2010. Plusieurs hypothèses ont guidé les réflexions compilées dans ce volume. La première consistait à envisager les raisons qui motivaient le corps médical à concevoir sa pratique comme un spectacle à part entière, puisant dans les ressources de la mise en scène théâtrale les moyens d’une représentation efficace de son pouvoir thérapeutique. L’hypothèse seconde relevait du constat réciproque que les théoriciens du théâtre, comme les dramaturges et les metteurs en scène, s’étaient emparé à maintes reprises du discours du médecin pour penser une poétique de la scène, exploitant les pathologies et les symptômes du malade pour établir un diagnostic de la pratique théâtrale. Cherchant à se légitimer mutuellement, théâtre et médecine ont été renvoyés dos à dos par leurs détracteurs, nourrissant aussi bien la critique de leurs effets pathologiques que l’éloge de leurs vertus thérapeutiques. Dans cette optique, les études réunies ici examinent cette relation de fascination et de répulsion mêlées, afin de penser le médical comme élément spectaculaire, et considérer le discours du médecin comme paradigme épistémologique pour le théâtre. À partir d’une double approche, diachronique et synchronique, cet ouvrage tente ainsi d’analyser des dispositifs et des discours communs à la médecine et au spectacle vivant.  
 
couverture3Belles lettres, sciences et littérature
Etudes réunies par Anne-Gaëlle Weber

S’il existe désormais de nombreuses études sur la question des „deux cultures“ et des partages disciplinaires entre sciences et humanités, elles tiennent rarement compte de l’écart existant entre le décret de leur séparation et sa réalisation effective, qui n’a pas toujours pris des formes aussi définitives ou univoques qu’on le croit généralement. C’est l’ambition de cet ouvrage que de redessiner l’histoire des articulations de la science et de la littérature en prenant pour point de repère temporel l’apparition de la notion moderne de « littérature » et le remplacement progressif du système des Belles Lettres par une nouvelle organisation des disciplines de l’esprit. Les études de cas réunies ici dessinent une nouvelle histoire de la séparation des « deux cultures », qui tient  compte de l’extrême variabilité historique et culturelle des mots « science » et « littérature ». Peut-on échapper à l’illusion rétrospective lorsqu’on analyse, à partir de nos catégories présentes, les « sciences » et les « littératures » passées ? Convient-il de subsumer l’étude de leurs rapports sous des catégories plus générales, comme les « imaginaires », ou faut-il considérer que les liens entre science et littérature jouent un rôle spécifique pour l’histoire de chacune de ces disciplines, qu’elles sont archétypales de certaines évolutions culturelles ? Tout en ébauchant un certain nombre de réponses à ces questions, cet ouvrage suggère que le modèle contemporain
la spécialisation des disciplines savantes pourrait être nuancé, voire remodelé dans le sens d’une plus grande complexité.

couv ammonites2La Poésie scientifique, de la gloire au déclin
Etudes réunies par Muriel Louâpre, Hugues Marchal et Michel Pierssens

Ce volume réunit les actes d’un colloque international organisé à Montréal en 2010. Il part d’une interrogation, et ouvre un champ d’investigation : après avoir connu une sorte d’apogée à la fin des Lumières, autour de figures comme Delille, Erasmus Darwin ou Goethe, la « poésie scientifique » a-t-elle disparu avec le romantisme, qui, selon Sainte-Beuve, consomma la déroute de la poésie didactique et descriptive ? A-t-elle au contraire survécu, comme le suggère l’analyse quantitative des données éditoriales françaises, jusqu’en 1900 ? En ce cas, que faire des œuvres qui ont cherché, après cette date, à réinventer les modalités d’un dialogue entre poème et sciences, quitte à tourner le dos à toute tradition antérieure ? Peut-on encore parler d’un même genre ? Enfin le destin de cette poésie fut-il identique en France et dans d’autres pays européens ? Ce sont les pièces de cette enquête en cours, poursuivie selon d’autres voies par l’anthologie Muses et Ptérodactyles (Seuil, 2013), qui sont versées ici au dossier, avec 26 contributions synthétiques, monographiques ou théoriques, couvrant plusieurs siècles et plusieurs langues, du XVIIIe siècle à nos jours.

Eighteenth-Century Archives of the BodyEdited by Elena TADDIA

Conference Proceedings of the International Workshop Archives of the Body. Medieval to Early Modern, Cambridge University, 8-9 Sept. 2011.  Téléchargez l’ouvrage en format pdf : Nous remercions la Bibliothèque de l’Académie Nationale de Médecine pour l’illustration de couverture : (c) Bibliothèque de l’Académie Nationale de Médecine

 

mecaniqueMécaniques du vivant : Savoir médical et représentations du corps humain (XVIIe–XIXe siècle)Sous la direction de Laurence Talairach-Vielmas

Actes du colloque. Explora 2011 à l’Université de Toulouse « Mécaniques du vivant : savoir médical et représentations du corps humain »  Télélarchargez le livre en format pdf : Pages 1-70 : Pages 71-129

 
 
Projections : Des organes hors du Corps
Études réunies par Hugues Marchal (Paris III) et Anne Simon (CNRS) 

Ce dossier spécial présente les Actes du colloque tenu les 13-14 octobre 2006 au MAC-VAL, Musée d’Art Contemporain du Val-de-Marne. Les actes du colloque PROJECTIONS : des organes hors du corps sont téléchargeables soit sous la forme d’un volume complet au format pdf (mais attention : la durée du téléchargement du fichier de 65M dépendra de votre bande passante) soit en cliquant ici pour une consultation chapitre par chapitre. [Actes->http://rnx9686.webmo.fr/IMG…] du Colloque International Projections : des organes hors (…)

Jules Verne et la vulgarisation scientifique

Vingt mille notes sous les textes — Daniel Compère Le document chez Jules Verne : valeur didactique ou facteur de configuration romanesque ? — Philippe Scheinhardt Technologies et société du futur : procédés et enjeux de l’anticipation dans l’œuvre de Jules Verne — Julien Feydy Les Voyages extraordinaires ou la chasse aux météores — Christian Robin Cartonnages et illustrations : de Jules Verne à Robida — Sandrine Doré et Ségolène Le Men

 
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Évolutionnisme et modèles d’interdisciplinarité : Haeckel, Quinet, Symonds et Spencer

Au cours du XIXe siècle, en France, mais aussi dans les autres pays occidentaux, le partage des disciplines se transforme. Non seulement la nomenclature des sciences change ainsi que le paysage des institutions qui ont en charge de les développer et les diffuser, mais la conception de la culture elle-même est modifiée. Si l’on entend par culture l’ensemble des savoirs et des pratiques qui se transmettent par tradition et s’enrichissent par les créations d’œuvres de l’esprit, cette culture est traditionnellement découpée en domaines dont chacun est régi par des règles, repose sur des valeurs et suppose des usages particuliers. Les domaines de la culture se superposent plus ou moins aux disciplines de l’esprit et en tous cas, les changements dans l’une supposent à plus ou moins long terme des réformes dans les autres, et vice-versa. On peut faire l’hypothèse qu’une invention culturelle telle que l’évolutionnisme, développée tout particulièrement dans la seconde moitié du XIXe siècle, n’a pas eu pour seul effet de modifier la structure interne du domaine des sciences de la nature mais a suscité une reconfiguration des relations entre différents domaines et notamment de nouveaux modèles d’interdisciplinarité entre sciences et lettres. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Walin.pdf

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Être actrice et mourir phtisique. Une malédiction de l’époque romantique

À l’époque romantique, les acteurs et plus encore les actrices sont supposés ressentir les émois de leur personnage. Au moment où le vitalisme ne fait plus autorité dans le monde médical, l’idée que la vie d’un sujet est d’autant plus brève que les passions qu’il a vécues ont été plus ardentes continue de hanter les imaginaires. La question se pose : intérioriser les tourments des personnages met-il en danger la santé des actrices ? Julie de Faramond tente d’y répondre en se penchant sur le cas de la phtisie, un mal qui, suivant la conception de l’époque, consumait les fonctions vitales de l’intérieur.

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Comment ‘envisionner’ un phénomène ? L’exemple de Horace-Bénédict de Saussure (1765)

Pour comprendre la construction du fait scientifique, il est nécessaire de tenir compte d’une dimension négligée par les historiens des sciences : les transformations du savant. À travers l’exemple de la découverte de la division des infusoires par Horace-Bénédict de Saussure en 1765, cet article étudie la nature de ces transformations et la manière dont elles s’opèrent. Leur reconstruction s’effectue ici par une analyse des cahiers de laboratoire du savant, qui font dans un premier temps ressortir les techniques de visualisation des êtres microscopiques. Peu à peu, Saussure se trouve pris dans des processus plus puissants, notamment l’envisionnement, qui consiste à parvenir à voir des choses que l’on n’a pas appris à connaître. L’élaboration de ce processus se laisse appréhender dans les cahiers à travers la construction des envisionneurs, c’est-à-dire des déterminations catégorielles-perceptives spécifiques qui permettent au savant de voir tels aspects du phénomène jusque-là inconnus, et par conséquent de le déterminer. Artisan de ses expérimentations aussi bien qu’ouvrier interne, le savant construit de nouveaux outils concrets mais aussi mentaux, ainsi qu’un contexte de réalité, le tout lui permettant de voir ce à quoi d’autres ne peuvent accéder faute d’avoir élaboré les mêmes outils. C’est pourquoi, face au fait scientifique, les envisionneurs constituent une forme d’évidenciation dont le rôle va bien au-delà de la seule conviction rhétorique.

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L’encyclopédisme des Questions sur l’Encyclopédie de Voltaire ?

Œuvre de vieillesse, située dans le sillage de l’Encyclopédie, les Questions sur l’Encyclopédie de Voltaire, cette « petite encyclopédie » de 440 articles se présente comme l’ouvrage d’ « amateurs », qui se déclarent « douteurs et non docteurs ». Voltaire cultive la fiction d’une œuvre collective, mais une dizaine d’articles tout au plus bénéficie de l’apport de collaborateurs. Fort d’une culture nourrie des recherches qui ont alimenté son abondante polygraphie, possesseur une grande bibliothèque, Voltaire se livre à un encyclopédisme militant, au service des Lumières. Même pour des orientations intellectuelles semblables dans le traitement des sujets, le lecteur d’articles de l’Encyclopédie et des Questions sur l’Encyclopédie se trouve confronté d’une part à l’esprit de sérieux, au souci d’informer, d’autre part à un parti-pris d’agrément, à des essais percutants. Même liberté de Voltaire dans le choix des entrées, dans sa relation tantôt affichée, tantôt réelle, mais dissimulée, tantôt absente avec l’Encyclopédie. Les questions posées à l’Encyclopédie s’effacent au profit d’une encyclopédie de sa pensée. Mots-clefs : Encyclopédie ; bibliothèque ; encyclopédisme militant ; œuvre pseudo-collective ; encyclopédisme en liberté.

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Sade et les esprits animaux : Du matérialisme électrique au stoïcisme passionné

Mots-clés : Sade, esprits animaux, Descartes, nerfs, électricité, stoïcisme, passions, apathie Résumé : La doctrine des esprits animaux joue un rôle important dans la philosophie de Sade, en particulier dans sa théorie des passions. Sade modifie consciemment la notion d’« esprits animaux » par rapport à la tradition de la première modernité, en la déplaçant au sein d’un « matérialisme électrique ». L’idée d’énergie appliquée aux esprits animaux annule le dualisme cartésien, permettant un nouveau lien entre vie psychique et mécanismes physiologiques. Cette conception électrique des esprits animaux permet de mieux comprendre le rapport entre le physique et le moral dans le nouveau modèle anthropologique défendu par Sade : le libertin. Au refus cartésien des passions, le ‘divin Marquis’ oppose une forme originelle de « stoïcisme passionné ». Le contrôle des passions, généralement considéré comme but ultime d’un parcours de sagesse spirituelle qui conduit l’individu à se soumettre à un ordre supérieur, devient le moyen d’accéder à la pleine expression, égotique et totalement terrestre, de la dimension passionnelle.

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Littérature et science sociale au XIXe siècle (note sur un parcours de recherche)

Permettez-moi d’évoquer ici plusieurs des apories auxquelles j’ai dû faire face au cours des quinze dernières années, lorsqu’il s’est agi pour moi d’échafauder une histoire comparée de la littérature et des sciences sociales, et donc de réfléchir aux manières de décrire les rapports entre les sciences et la littérature. Mon cas n’a aucun intérêt en soi, bien évidemment, mais il pourrait exemplifier des traits propres à une certaine communauté de chercheurs que fédèrent des préoccupations similaires et des difficultés analogues. Les quelques éléments de réflexion que j’aimerais vous soumettre aujourd’hui s’inscrivent dans le prolongement de mon travail de thèse sur la notion de « type » au XIXe siècle. Je m’y étais interrogé sur les raisons pour lesquelles on en est venu dès les années 1820, aussi bien dans la littérature que dans les enquêtes sociales, à décrire la société à partir des « types » qui la composent soudain dans l’expérience ordinaire (le type du petit-bourgeois, du rentier, de la femme comme il faut, de l’ouvrier imprévoyant, etc.). Je me suis demandé comment la notion de « type » s’était imposée durant la première moitié du XIXe siècle comme une catégorie de description de la réalité concurrente à celles de « classes sociales » ou de « professions » — comment elle s’était imposée non pas seulement en histoire naturelle ou dans les sciences médicales, où son sens était d’ailleurs un peu différent, mais dans le roman, « la science sociale » (comme on l’appelait à l’époque), l’histoire post-romantique ou l’anthropologie naissante. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/David.pdf

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Telling the Story of Life Twice: Henry Knipe and the Versification of Natural History

The History of Life, sometimes called the Evolutionary Epic , is a genre straddling science and literature that came into being in the middle of the nineteenth century as a way of presenting a synthesizing overview of the findings of the new discipline of palæontology. Although the palæontologists themselves usually concentrated in their writings on the meticulous description of a specific kind of fossil remains or a particular find, there was clearly space for more general accounts that would attempt to encapsulate 'the story as a whole’, summarising the entire 'History of Life’ from its first foundations to the present day. It would be an extraordinary but purely factual history, a veritable Bildundsroman with Life itself as the hero.

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L’ŒIL DE L’ETHNOGRAPHE

Le texte propose une réflexion sur le voyage ethnographique et sur la formation de l’ethnologue qui y est associée. Cette réflexion se fait par une voie oblique : l’examen d’un texte de l’écrivain et anthropologue Michel Leiris (1901-1990), publié dans Documents et écrit peu avant son premier voyage de terrain en Afrique, alors qu’il intègre la Mission Ethnographique et Linguistique Dakar-Djibouti (1931-1933). Il s’agit d’examiner les références intellectuelles de Michel Leiris en phase de formation comme ethnologue et les rapports entre littérature et ethnographie dans son œuvre. Mots-clés : Michel Leiris, « L’œil de l’ethnographe », voyage et ethnographie, Raymond Roussel, Georges Bataille

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Corps extrêmes : chirurgie et performance dans l’art contemporain

Longtemps érigées en spectacles, puis interdites aux regards profanes au début du XXe siècle, les opérations chirurgicales ont retrouvé une forme de théâtralité dans les années 1990, avec le développement de performances artistiques mobilisant le concours de chirurgiens et les moyens de la médecine lourde, en particulier chez ORLAN, Kac et Stelarc. Comment les actions inédites déplacent-elles les relations entre corps, médecine et esthétique ?

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« Il y a de la grandeur dans cette conception de la vie » : Théories de l’évolution et fiction britannique contemporaine (Byatt, Mc Ewan) 

La présence des théories de l’évolution et, en particulier, des références darwiniennes dans la fiction britannique contemporaine est notable et a fait l’objet de plusieurs études récentes1. Plusieurs facteurs peuvent l’expliquer et, parmi eux, le développement d’un courant qualifié de néo-victorien, qui réunit des œuvres dont l’intrigue se situe en totalité ou pour partie au XIXe siècle. Sally Shuttleworth a pu mettre en relation la floraison de ces romans dans les années 1990 avec la politique menée par le gouvernement de Margaret Thatcher. Selon Shuttleworth, ce choix narratif permettait une double critique, par une discussion des structures de la famille victorienne exaltées par M. Thatcher comme un modèle d’ordre et de stabilité et par la mise en perspective du XIXe siècle anglais à un moment où le gouvernement s’en servait pour justifier une forme de darwinisme social2. L’œuvre d’Antonia S. Byatt s’inscrit pour une large part dans ce champ, en accordant une place importante à l'époque victorienne, que tout le récit y prenne place3 ou qu'il se construise dans l'alternance des deux plans temporels4. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Hermetet.pdf

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Les esprits animaux et la châtaigne de Phutatorius : kinésie et agentivité dans Tristram Shandy de Laurence Sterne

Né en Irlande en 1713 et mort en 1768 d’une tuberculose, Laurence Sterne était un pasteur anglais qui officiait dans le Yorkshire. Il voyagea en Italie et en France, cherchant un climat susceptible d’apaiser sa tuberculose, pour finalement mourir à Londres. Il a peu écrit, mais son chef d’œuvre, Vie et opinions de Tristram Shandy, gentilhomme, roman publié en plusieurs volumes entre 1759-1767, eut une influence sur l’histoire de la littérature aussi grande que les œuvres de Cervantès et de Rabelais, dont Sterne se réclamait. Tristram Shandy fut par exemple à l’origine de Jacques le Fataliste de Diderot.

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Des anthologies invisibles : la poésie en revue dans Nature, Science et La Nature (1880-1900)

Dans une récente et précieuse synthèse, l’historien Robert Fox estime que la désaffection qui frappa la poésie scientifique en France, après la vogue suscitée par les productions de Delille, se produisit au profit de la presse de vulgarisation. Certes, le basculement fut graduel, puisque Pierre Daru composa dans les années 1820, à la demande de Laplace, un poème sur L’Astronomie qui parut de façon posthume en 1830 . Mais le glissement, précise encore Fox, est consommé au milieu du siècle. Début d’un « âge d’or de la vulgarisation, qui dura jusqu’aux premières années du siècle suivant », cette période contraste avec la fin des Lumières et la période postrévolutionnaire, qui avaient encensé Delille

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LITTÉRATURE ET SCIENCE. CONVERGENCE ET DIVERGENCE

Au cours du XVIIe siècle, une fracture de plus en plus grande se creuse, de manière progressive et systématique, entre deux modes de connaissance du monde : la littérature et la science. Les deux raisons à l’origine de cette division font l’objet d’un consensus assez large : il s’agit de l’utilisation des mathématiques comme langage de la science et de l’introduction d’une méthodologie empirique. Il existe cependant une autre cause qui n’a pas été suffisamment traitée dans la littérature. Nous verrons dans cet article que l’introduction, au XVIIe siècle, du télescope et du microscope a permis à la science d’accéder à des domaines de la réalité hors de la portée de l’échelle humaine. Les domaines astronomique et microscopique ont fini par relever exclusivement de la connaissance scientifique et une grande partie de la réalité est ainsi devenue inaccessible pour la littérature et les autres sciences humaines et sociales. La science et la littérature se sont dès lors consacrées à étudier des domaines de la réalité qui s’excluaient mutuellement et elles ont cessé de communiquer. Cette tendance a cependant commencé à s’inverser au cours des dernières décennies. La convergence de la littérature et de la science en tant que formes complémentaires de comprendre le monde passe, principalement, par un traitement à l’échelle humaine des problèmes. Il existe, à l’échelle humaine, de nombreuses questions qui ne peuvent pas être abordées uniquement par la science ou uniquement par la littérature, du fait même de leur complexité ; et c’est dans ce domaine que nous devons rechercher de possibles hybridations, où les sciences exactes et les sciences humaines et sociales pourront dialoguer et interagir, et qui exigeront également de nouvelles stratégies épistémologiques. Mots-clés: Littérature et science, transdisciplinarité, méthode, langage, instruments, épistémologie.

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La prose des savoirs et le poème du monde

Ô Nature, ô assemblage infini et éternel De tes essences et de tes espèces tu remplis l'univers D’une foule de corps et d’astres divers et d’innombrable soleils éclairant l'éternel De planètes, de lunes, et de comètes de météores, d’astéroïdes, les bolides très nets existants avec bornes, formes remplissant l’univers et qui est l’espace, le vide, l’infini, l’immatériel de toutes les essences, remplit le firmament de Dieu éternel, infini et tout-puissant des soleils innombrables éclairant le matériel des comètes et des lunes, peuplant l’univers des systèmes solaires, et planétaires composant des mondes innombrables et des terres espaces, essences-variés à l’infini et finis composant l’ensemble des mondes et des paradis. Le nombre des espèces est fini et incalculable rien de plus charmant ni de plus agréable.

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ORLAN

Orlan est une plasticienne qui use de son corps comme d’un matériau où elle inscrit, par le biais de la chirurgie plastique, une réflexion sur le statut du corps dans notre société et les pressions idéologiques, politiques et religieuses qu’il subit. En filmant ses opérations (parfois en direct, constituant ainsi autant de Happenings), Orlan a fait de son corps le lieu d’un débat public où se posent ces questions cruciales pour notre époque.

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Le miroir qui décrit. Lecture Neurocognitive de La Jalousie de Robbe-Grillet

Une fenêtre s'ouvre sur le paysage. Elle cadre des scènes humaines. La fenêtre est recouverte d’une jalousie dont les lames cachent partiellement les détails du paysage et des scènes. La vision à travers cette fenêtre possède de nombreux points aveugles – de nombreuses bandes qui empêchent de voir. La profusion de ces bandes incite la description à adopter un fonctionnement rappelant celui de la rétine et son point aveugle (celui où elle entre en connexion avec le nerf optique) : le cerveau remplit cette cécité avec de l’information venant de l’image visuelle des alentours de ce point, tout en cherchant de la cohérence (ainsi que le font les systèmes de photographie numérique actuelle). Mais il arrive parfois que dans le point aveugle l’on puisse voir des images sans relation avec l’entourage et qui seraient dues à d’autres aires cérébrales ; il y a des sujets qui affirment y voir des dessins animés1. Une situation de cet ordre pourrait concerner le regard qui se charge de la description dans La Jalousie : doit-elle remplir les zones aveugles de sa vision ? Et si c’est le cas, comment s’y prend-elle ? Au moyen d’un tissu narratif-descriptif cohérent avec ce qui a été effectivement vu ? Ou au moyen de la description d’images envahissantes qui n’ont pas été capturées par la rétine et qui viennent de quelque région cérébrale ? Les pages qui suivent exploreront les réponses que propose le roman2. Téléchargez cet article au format PDF: pdf/Lanza.pdf

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Un passé présent ? Des esprits animaux dans la poésie moderne et contemporaine

Mots clés : Poésie, physiologie, longue durée, matérialisme, René Descartes, Michel Deguy, Bernard Noël. Résumé : Quelle pertinence la notion d’esprits animaux a-t-elle pu conserver dans la poésie française des XIXe et XXe siècles, et par là, dans les mentalités, à une période où le concept avait de longue date perdu tout crédit pour les sciences du vivant ? On tente d’examiner cette question à partir d’un bref panorama de textes s’étalant de la fin des Lumières à la Belle-Époque, avant d’étudier l’exemple de deux poètes contemporains, Michel Deguy et Bernard Noël.

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Une fonction propagandiste de la poésie scientifique à l’aube du XIXe siècle : le Lucrèce français de Sylvain Maréchal (1798)

Afin d’analyser la fonction propagandiste de la poésie scientifique, nous porterons un regard historiographique sur l’ouvrage de Sylvain Maréchal intitulé Le Lucrèce français, poème athée publié en 1798, ainsi que sur l’œuvre qui se situe en amont de ce texte de la Révolution comme de la poésie scientifique occidentale, à savoir le De rerum natura de Lucrèce.

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À PROPOS DES AUTEURS

  Téléchargez l'article au format PDF : À PROPOS DES AUTEURS     Guilhem Armand est Maître de Conférences en littérature française à…

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Le théâtre des opérations promotionnelles de l’institut Benway

Depuis 1950, l’Institut Benway commercialise des organes et des organismes de confort : glande salivaire aromatisée, barrette de mémoire, testicule hallucinogène, chat de synthèse… Commandité pour célébrer le jubilé de ce pionnier mondial des biotechnologies, l’artiste multimédia Mael Le Mée a digéré 60 ans d’archives inédites. Il les restitue sous forme d’installations, de performances et de textes, construisant depuis 2004 un théâtre des opérations Benway, entre simulation et documentaire.

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La poésie scientifique du XIXe siècle : oppositions et réconciliations avec la religion

Au XIXe siècle, la science alimente de nombreux débats et, de manière corrélative, la poésie scientifique est loin d’être neutre. En particulier, la question de la religion et de Dieu revient sous presque toutes les plumes. Traditionnellement, religion et science font mauvais ménage dans les esprits. C’est au point que Jacqueline Lalouette, qui a étudié l’anticléricalisme au XIXe siècle, parle de « sciences de combat » : science des religions, sciences de la terre et sciences de la vie sont avancées pour démontrer l’inexistence de Dieu. L’examen du corpus Euterpe (1792-1939) révèle plusieurs positions relativement à la question religieuse ; comme on s’en doute, bon nombre d’auteurs opposent science et religion. Il est intéressant de confronter leurs arguments à ceux des poètes qui essaient au contraire de les réconcilier.

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Entretien avec Thibault Rossigneux (Compagnie « Le Sens des mots »)

Directeur artistique, metteur en scène, comédien et auteur, Thibault Rossigneux est aussi fondateur de la compagnie Le sens des mots avec laquelle il développe les rencontres « Binômes « entre des auteurs dramatiques et des scientifiques (Festival d’Avignon, Palais de la Découverte, Cité des Sciences, Théâtre du Rond-Point des Champs Elysées).

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Le commerce de la science : poésie scientifique et rhétorique publicitaire

Conservé dans une liasse de brochures à la Bibliothèque Nationale, l’« Hommage à la science » d’un certain François Devillaine est un long poème de quatre-vingt dix vers joliment mis en page, avec une typographie soignée. De son auteur, on sait qu’il était professeur en retraite de l’Université de Toulouse et membre d’honneur de l’Athénée des Troubadours, un cercle de poètes amateurs . Dans le thème, dans le ton, en alexandrins appliqués, ce texte, quoique dénué d’annotation savante, illustre le genre de la poésie scientifique et sa topique progressiste. L’ample exorde s’enthousiasme sur ce XIXe siècle finissant qui, par la volonté de Dieu, aura été celui de la science, et présente une galerie de savants célèbres, Fulton, Ampère, Pasteur. À l’éloge du siècle succède celui d’une découverte merveilleuse, celle du gaz acétylène, carburant extraordinaire dont la « flamme vive » surpasse en rayonnement ses « modernes rivaux ».

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Entretien avec Christine Dormoy (Compagnie « Le Grain »)

Christine Dormoy est metteur en scène et dramaturge, fondatrice de la compagnie Le Grain. Elle ouvre des voies théâtrales nouvelles à partir de l’exploration de partitions musicales. La question de la musicalité dans la direction d’acteur et la pratique du chant l’amènent à entreprendre des études musicales au cours desquelles la découverte des partitions contemporaines sera déterminante : elle crée la Compagnie Le Grain. Grâce à un parcours singulier qui intègre l’influence de Peter Brook pour la direction d’acteurs, la pratique de terrain en milieu rural pour la relation aux publics, et la recherche formelle issue des écritures savantes, on voit apparaître, au fil de ses mises en scène, un univers sensible, au « grain » bien reconnaissable. Elle est à l’origine de nombreux spectacles comme Chantier Fabbrica (2014), Cantatrix Sopranica L. (2006), Vertiges (1999).

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Louis Bouilhet et Flaubert. L’invention d’une nouvelle poésie scientifique

Ami de Flaubert, Louis Bouilhet partageait quelques-unes de ses idées esthétiques, en particulier sa conception de l’art pour l’art, de l’impersonnalité de l’écrivain. Hostiles à l’implication du Moi, des sentiments et des opinions dans la littérature, les deux écrivains considéraient la science comme un modèle esthétique à opposer au romantisme. « La littérature prendra de plus en plus les allures de la science », disait Flaubert (lettre à L. Colet, 6 avril 1853). Si, en 1854, Louis Bouilhet dédie à son ami le poème Les Fossiles plutôt qu’un autre poème, c’est sans doute parce que les deux écrivains partagent le même attrait pour les sciences naturelles.

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