15Epistémocritique, Volume 15. Savoirs et littérature dans l’espace germanophone.
On assiste aujourd’hui à une véritable explosion des recherches sur les savoirs et la littérature en Europe. Il devenait urgent de rendre compte de la vitalité de ces recherches en faisant un tour d’horizon des travaux qui essaiment aujourd’hui à travers toute l’Europe. Cette quinzième livraison d’Epistemocritique initie ce tour d’horizon par un état des lieux de la recherche dans les pays de langue allemande (Allemagne, Autriche, Suisse), où une variété d’approches et de positions différentes se sont développées, donnant lieu à des controverses parfois très vives. Réalisé par Hildegard Haberl, ce numéro d’Epistemocritique propose un éventail de quelques-unes de ces approches et orientations ainsi que des tensions et débats qu’elles ont suscités, témoignant de la vitalité d’un champ aujourd’hui en plein essor dans le monde germanophone.

14Epistémocritique, Volume 14. GREFFES.
Greffes, hybridations, percolations… les métaphores ne manquent pas pour décrire la circulation des modèles, des idées et des représentations entre sciences et littérature. Parmi ces métaphores, celle de la greffe jouit d’une mémoire culturelle et d’une épaisseur historique toutes particulières : aux XVIIIe et XIXe siècles, elle a été mobilisée de façon massive par les scientifiques et les écrivains pour figurer différentes modalités du dialogue entre discours littéraires et savants. Les études réunies dans ce volume illustrent quelques-unes de ces modalités, interrogeant à partir d’exemples précis les rapports réciproques de la science et de la littérature, leur concurrence possible dans le champ du savoir, mais aussi la manière dont se constituent l’une par rapport à l’autre la « connaissance de l’écrivain » et la « connaissance du savant.

13Epistémocritique, Volume 13. Littérature et savoirs du vivant.
Depuis le 19ème siècle, moment où naissent les sciences du vivant, la circulation des modèles et des théories liés à ce domaine crée un espace de production épistémique qui permet aux représentations culturelles du vivant de se diffuser et de percoler dans la pensée historique, politique et sociale grâce à une série d’analogies, de déplacements métaphoriques, de généralisations et d’extrapolations. Les études réunies dans ce numéro visent à cerner la diversité de ces appropriations et des usages qui ont été faits des sciences du vivant dans le champ plus vaste des savoirs sur l’homme, mais aussi dans la production littéraire et, plus généralement, dans l’imaginaire, afin de mettre en évidences leurs enjeux idéologiques ainsi que les effets de culture qu’elles ont produit.

12Epistémocritique, Volume 12. Littérature et économie.
Le monde économique et le monde de la littérature et des arts ont souvent, depuis le Romantisme, été considérés comme antithétiques. Cependant les relations économiques sont présentes dans de nombreux textes et dessinent même une tradition littéraire. Après un bref parcours historique, du marchand dans la littérature du XVIIe siècle au Robinson de Defoe, des tribulations des personnages de Balzac dans le contexte du libéralisme naissant aux textes de Masséra, la littérature mettant en scène l’économie, surtout en période de crise, ne se contente pas de la représenter mais elle interroge les principes et l’éthique qui la fondent et entretient avec elle un dialogue constant .

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Fiction et savoir. La dimension épistémologique du texte littéraire au XXe siècle (Marcel Proust)

Résumé : Cet article réfléchit sur le rapport problématique entre fiction et savoir, en s'appuyant sur la théorie des systèmes luhmannienne. Selon cette analyse, lorsqu’un texte de fiction contient des éléments épistémiques, ceux-ci sont soumis à un « double codage », épistémique et esthétique, ce qui leur donne une fonction potentiellement auto-réflexive. Cette thèse est illustrée par une analyse d’À la recherche du temps perdu, qui montre l'hésitation du narrateur entre une position mettant sur le même plan l’écrivain et le scientifique et une position affirmant la différence entre les deux.

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Littérature, arts visuels et neuroesthétique

Grâce à l’arrivée de l’imagerie fonctionnelle il y a vingt-cinq ans et aux progrès continus réalisés depuis, il est maintenant possible de dresser la carte directement de l’activité du cerveau durant des tâches de perception et d’activité chez des sujets normaux. Fondée sur ces découvertes, la dernière décennie a ainsi observé des bouleversements majeurs dans la compréhension du cerveau musical. Dans cet article, nous nous sommes cependant limité aux relations de la neurologie essentiellement avec la littérature et les arts visuels.

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La norme et l’écart : étiologie et idéologie au XIXe siècle

Tout cela étonnera fort les gens du monde, qui, en général, ont pris le mot Mathématique pour synonyme de régulier. Toutefois, là comme ailleurs, la science est l'œuvre de l'esprit humain, qui est plutôt destiné à étudier qu'à connaître, à chercher qu'à trouver la vérité […]. En vain les analystes voudraient-ils se le dissimuler, ils ne déduisent pas, ils combinent, ils comparent ; quand ils arrivent à la vérité, c'est en heurtant de côté et d'autres qu'ils y sont tombés.1 Les mathématiques sont souvent présentées comme un langage. Qu’ils les considèrent comme provenant d’un autre monde, le monde des « idées pures »2, ou comme le « langage commode » donnant accès à l’ « harmonie interne du monde »3, de nombreux discours sur les mathématiques s’organisent autour d’une distinction entre ces dernières et le « monde », au sens de ce qui se situe hors du langage. C’est à de tels discours de démarcations que nous consacrons cet article. Notre objectif n’est cependant pas de déconstruire ces discours du point de vue de l’histoire sociale4, ou de traiter des problèmes épistémologiques posés par des distinctions entre logique et intuition ou abstraction et expérience. Nous envisageons plutôt ces discours de démarcation en tant qu’ils forment des récits dont nous souhaitons saisir certaines modalités de construction et d’évolution.

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The Language of Synesthesia

ABSTRACT: In "The Language of Synesthesia,” Marcia Smilack tells the story of her life as a fine art photographer who taught herself how to use a camera by relying on her synesthetic responses as signals for when to click the shutter. Photographing reflections on moving water, she created a career in which named herself a Reflectionist and named her images paintings by camera. The responses that tell her to take a picture include sound and texture elicited by what she sees. In detailing her history, she tells of the seminal experience at age six when she struck a piano note for the first time and instantly saw the color green; the musical sound elicited color. Later in her life, she became aware that her synesthesia worked in reverse as well. That is, looking at color and shape elicits sound and texture. She hears with her eyes and sees with her ears. She explains that from the first "green note” of her childhood, a room was carved out in her mind where all subsequent synesthetic experiences are viewed on an internal screen. It is the same room where her eidetic memories are preserved in present time. She lives her life in metaphor and describes the double life created by her synesthesia. That synesthesia is itself a language is obvious to her, which she shows with several examples from her artwork where the symbols of her photographs serve as musical nomenclature. The picture language that her body produces made of colors and shapes provide a natural metaphor to the words that come to her secondarily as a translation of what she sees. She calls her synesthetic picture language her native tongue and shows the relationship between her waking synesthesia and the synesthesia of her dreams, posing the question of whether synesthesia might be a waking form of dreaming.

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La notion de force dans Faust I de Goethe

Certains mots suscitent l’engouement d’une société à une époque déterminée, ils surgissent et connaissent un succès sémantique avant de disparaître au terme d’une période parfois éphémère ; bref, il existe une mode des mots.

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Poétique et épistémologie du vivant dans l’œuvre scientifique et théâtrale de Georg Büchner

« Je passe mes journées avec le scalpel et mes nuits avec les livres […] », écrit Büchner à son frère Wilhelm en 1836. Büchner, qui était à la fois médecin et dramaturge, passionné par l’anatomie et la physiologie du cerveau, n’a jamais séparé son activité scientifique de son activité créatrice. Son « théâtre de l’anatomie » ne peut donc être compris sans tenir compte de sa pratique de la dissection, de la conception du vivant et de l’épistémologie qu’il a élaborées au fur et à mesure de ses recherches en médecine et en biologie, qui rejoignent ses préoccupations sur l’organisation sociale et le sens de l’histoire. L’œuvre littéraire et scientifique de Büchner manifeste une unité de sens qui trouve finalement son principe dans le corps, origine et fin de toute connaissance, en même temps que ressort principal d’une esthétique anti-idéaliste, qui veut exposer le vivant dans sa matérialité nue, dans son essentielle vulnérabilité. Cette esthétique porte la trace du geste de disjonction qui fonde l’anatomie dissectrice, élevant le fragment au rang de forme-sens qui, indépendamment des énoncés dont il est porteur, exprime la violence et la radicalité du geste qui découpe, décompose, morcelle pour donner à connaître.

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Dantec et Narby : Sciences, épistémologie et fiction

« Le livre de Jeremy, que j’avais lu en 1996, avait été un tel choc, révélant des données scientifiquement collectées dont j’avais plus ou moins intuitivement deviné l’existence (coexistence métamorphique de l’ADN et du cerveau), que je devais en faire une des pierres angulaires de ce premier « roman d’anthropologie métahumaine » que fut Babylon Babies.» Maurice Dantec, Laboratoire de catastrophe générale, p. 67[[L’on désignera dorénavant par des abréviations les livres les plus cités : BB : Babylon Babies, Paris, Gallimard, folio SF, 1999. ThOp : Le théâtre des opérations, Journal métaphysique et polémique, 1999, Paris, Gallimard [Folio, 2000]. ThOp : Laboratoire de catastrophe générale, Journal métaphysique et polémique 2000-2001, Paris, Gallimard, folio, 2001 : LCG ; American Black Box, Le théâtre des opérations, 2002-2006, LGF, coll. Le Livre de Poche, 2009. VV : Villa Vortex, Paris, Gallimard, La Noire, 2003. PP : Périphérique, Paris, Flammarion, 2003. LSP : Le serpent cosmique. Les intiales M.G.D. désigneront Maurice G. Dantec et J.B., Jeremy Narby. Ouvrages de Narby discutés : Intelligence dans la nature, Buchet-Chastel, Paris, 2005 (trad. Intelligence in the Nature, Tarcher, N.Y. 2005) ; Narby Jeremy et Huxley Francis, Chamanes au fil du temps, Paris, Albin Michel, 2002 ; Narby Jeremy, Dubochet, Jacques, Kiefer Bertrand, L’ADN devant le souverain : Science, démocratie et génie génétique, Genève, Georg éditeurs, 1997 ; Narby Jeremy, Le serpent cosmique : L’ADN et les origines du savoir, Genève, Georg éditeurs, 1995 (trad. The Cosmic Serpent: DNA and the Origins of Knowledge, Tarcher, 1999); Narby Jeremy, Amazonie, l’espoir est indien, Paris, Favre, 1990; Narby Jeremy, Beauclerck John, Townsend, Janet, Indigenous Peoples: A Fieldguide For Development, Oxford, Oxfam, 1988.]].

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Le vivant, l’organisme et la morphologie : repenser la forme au début du XIXe siècle. L’exemple de Goethe

Les nombreux essais qui encadrent La Métamorphose des plantes sont autant de récits qui analysent la formation scientifique de Goethe, son rapport aux savoirs du vivant, et la mise en forme littéraire d'une telle expérience. Ces écrits participent d'une pensée de la forme qui met en relation le sujet et les objets perçus (la nature) : c'est dans la conscience que s'élabore la mise en forme du monde et la mise en forme artistique. La morphologie devient une science de la métamorphose et permet de rendre compte de l'unité de la démarche scientifique et artistique de Goethe.

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Sophie Calle: le corps exposé

Au XXe siècle, et plus encore depuis les années soixante avec l’avènement de la libération sexuelle et le féminisme, le corps s’est affranchi des anciennes contraintes sociales et morales de la société. Le corps est alors réinventé et devient un instrument de pratiques sociales, un corps organique, un corps subjectif, enfin, un corps matériel, exploité par plusieurs artistes et auteurs qui en font un objet de représentation.

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Flaubert et le philosophique : éthique et esthétique

Par le travail de l’intertextualité, perceptible dans les énoncés de sa correspondance, mais aussi par la forme critique – qui est encore une forme de pensée – Flaubert conserve un rapport au philosophique. Il est même au centre de son esthétique et de son éthique parce que la Vérité étant frappée d’immoralité lorsqu’elle a la forme d’un discours, il lui faut régler différemment le rapport de l’œuvre au cognitif. [Une version imprimable de cet article est accessible en pied de page.]

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Declinaciones epistémicas de la metáfora en Sol absolu de Lorand Gaspar // Déclinaisons épistémiques de la métaphore dans Sol absolu de Lorand Gaspar

Este estudio indaga la naturaleza «plástica» del contenido epistémico cuando adquiere actuaciones literarias. Para ello se ofrece un análisis de algunos de los modelos metafóricos de la obra Sol absolu (1972), de Lorand Gaspar. Se glosan distintas estrategias enunciativas que revela la estructura metafórica de la obra en las que la inserción del conocimiento juega un papel crucial. En sus diversas modulaciones, el episteme, raíz o núcleo del pensamiento conceptual, se expresa aquí en el entramado de terminología científica que despliega la obra literaria. Se trata, sin embargo, de un entramado conceptual que adquiere valores poéticos. La cuestión central del estudio consiste en dilucidar cómo opera el conocimiento en la generación de enunciaciones poéticas, principalmente a través de dispositivos metafóricos; esta averiguación conducirá a elaborar una síntesis de los mecanismos que caracterizan la metaforología de la obra. Palabras clave: metáfora, episteme, estésis, Lorand Gaspar, Sol absolu. Cette étude sonde la nature « plastique » du contenu épistémique lorsqu’il s’incarne sous des formes littéraires. Pour cela, elle propose une analyse de quelques-uns des modèles métaphoriques de l’œuvre Sol absolu (1972), de Lorand Gaspar. Y sont commentées plusieurs stratégies énonciatives que révèle la structure métaphorique de l’œuvre, dans lesquelles l’insertion de la connaissance joue un rôle crucial. Dans ses diverses modulations, l’épistémê, racine ou noyau de la pensée conceptuelle, s’exprime ici dans l’entrelacs de terminologie scientifique que déploie l’œuvre littéraire. Il s’agit cependant d’un entrelacs conceptuel qui acquiert des valeurs poétiques. La question centrale de l’étude consiste à élucider comment la connaissance opère pour produire des énonciations poétiques, principalement au travers de dispositifs métaphoriques ; cette investigation amènera à élaborer une synthèse des mécanismes qui caractérisent la métaphorologie de l’œuvre. Mots-clés : métaphore, épistémê, esthésie, Lorand Gaspar, Sol absolu.

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Habiter en nomade le « je » (Lecture et écriture du « je » dans Prison, de François Bon)

Résumé : Le récit et la fiction en prose, parce qu’ils utilisent le langage de l’expérience humaine, et par là, les déictiques qui renvoient, par le pronom Je, à la proprioception de soi, ou à la localisation d’un soi, permettent la projection d’une conscience lectoriale qui soit aussi un corps imaginaire, voyageant dans un univers fictif ou réaliste. Dans le texte de François Bon, Prison (1997), récit d’atelier d’écriture en prison, est donnée à lire la construction d’un sujet, à travers la consigne évoquant le mot « foyer », et ce qu’il implique de lien entre le lieu et la vie intime. Écrivant à travers une langue commune à l’auteur et au lecteur, dans un discours intérieur qui se façonne sous nos yeux, le texte propose un lien entre espace et vie interne. A travers le « je » habitable par tous (nouement de la proprioception et du langage, selon les démonstrations de François Récanati), à travers les embrayeurs de lieu qui incitent à promener un corps imaginaire dans un espace (selon Deixis in narrative et les travaux de Käte Hamburger), et l’usage des temps multipolaires (expliquant l’ubiquité du lecteur, selon Marcel Vuillaume, permettant d’être en plusieurs lieux à la fois), les analyses fondées sur la philosophie du langage et la pragmatique tendent à étayer l’hypothèse selon laquelle le lecteur projette un corps imaginaire dans un espace, et non seulement un esprit, lors de l’immersion dans sa lecture, surtout quand lui sont donnés à lire des déictiques de première personne ou des coordonnées spatiotemporelles égo-centrés. On peut donc considérer que la parole intérieure du lecteur, modelée par la voix du texte, génère un corps imaginaire dont les mouvements et déambulations délimitent un « espace intérieur ». Mots clés : Monologue intérieur, déictiques égo-centrés, embrayeurs, projection du lecteur, immersion du lecteur, théorie de la lecture, empathie du lecteur, littérature française contemporaine, François Bon, François Récanati, Vincent Descombes, Christian Metz, Atelier d’écriture, écrire sa vie.

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Le modèle scientifique dans le théâtre de Tom Stoppard

Dans le théâtre britannique contemporain, les références aux sciences dures sont de plus en plus fréquentes. Le dramaturge Tom Stoppard a été un précurseur de cette fascination du théâtre pour les sciences: dans une écriture qui combine le désir de logique à l'incertitude de la connaissance, les théories mathématiques et physiques lui ont servi aussi bien de modèles que de métaphores structurantes permettant de renouveler la fable dramatique.

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4 – Viralité et humanité : la figure du non-corpum chez David Mitchell

David Mitchell, auteur britannique contemporain, a introduit au sein de son univers fictionnel des personnages de non-corpum, des entités dotées de conscience mais dépourvues de corps qui parasitent les humains. Deux romans en particulier les mettent en scène : Ghostwritten (1999) et The Bone Clocks (2014). Il s’agira ici d’étudier en premier lieu comment la viralité est mise en scène, puis d’examiner la valeur sémiotique du non-corpum laquelle s’articule à la pratique du diagnostic. À la fois signes et symptômes, ces figures virales offrent à nos sociétés contemporaines un miroir où viennent se refléter l’angoisse de la contamination et de l’impuissance ainsi que la crainte de voir le sujet dépossédé de soi. Mitchell utilise les non-corpum pour opérer un travail de couture entre plusieurs romans, mais aussi plus largement entre plusieurs traditions de pensée et plusieurs époques. Ce faisant il vient perturber les hypothèses de lecture occidentales les plus courantes, notamment via la référence à la métempsychose et la mise en œuvre de stratégies de réplication. Mots-clés David Mitchell, Ghostwritten, The Bone Clocks, métempsychose, viralité, diagnostic, peurs contemporaines, non-humain.

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5 – Le parasite, de l’être mimétique à l’inquiétante familiarité

L'existence du parasite est conditionnée par l’autre, il vit aux dépens d'un autre organisme, d'une autre structure. Dans cet article, nous nous intéressons aux parasites surgissant dans la littérature mais aussi dans les sciences et tout particulièrement en biologie. Nous allons axer notre réflexion sur une stratégie parasitaire, le mimétisme. Comme l’œuf du coucou (oiseau parasite) ressemblant à l’œuf de son hôte, le parasite, à travers le mimétisme, a deux objectifs : se faire accepter par l'hôte et le remplacer progressivement. Tartuffe, par exemple, le plus célèbre des parasites de Molière, singe la dévotion et devient le directeur de conscience d’Orgon. Il se fait ainsi accepter dans la famille et va prendre doucement la place du maître de la maison. Cependant, malgré le mimétisme du parasite, il reste dans son comportement, son physique, ses attitudes, des anomalies engendrant une inquiétante étrangeté. Ainsi, dans la nouvelle de Le Fanu, Carmilla, le vampire ressemble étrangement à Laura et, de plus, réactive des souvenirs chez cette dernière. L'hôte ressent cette inquiétante familiarité en compagnie du parasite. Nous allons dans cet article répondre à plusieurs questions : quelles sont les principales stratégies parasitaires ? Comment cette inquiétante familiarité perturbe-t-elle l'identité de l'hôte ? Notre hypothèse est que même si la relation parasitaire est coûteuse pour l'hôte, elle est aussi source de bénéfices. Mots-clés parasitisme, inquiétante familiarité, mimétisme

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Savoir de la science et savoir de la littérature. À propos du Docteur Pascal de Zola et de Giacinta de Capuana

Le point de départ de cet article* est l’identification du roman et du discours scientifique telle qu’on peut la trouver dans les écrits théoriques de Zola. L’analyse du Docteur Pascal montre cependant que dans la pratique esthétique de Zola le rapport entre la science et la littérature est plus complexe que dans ses écrits théoriques. D’une part la science apparaît moins triomphante, dans la mesure où elle doit se contenter d’avancer en tâtonnant et par hypothèses. D’autre part, la science, surtout lorsqu’elle est naissante, doit coopérer avec l’imagination poétique. Le roman Giacinta de Capuana a le même point de départ que les romans de Zola. Il s’agit de donner une réponse à un problème que l’on peut considérer comme un problème scientifique, à savoir la réaction d’un organisme à une lésion, causée par la découverte prématurée de la sexualité. Cette question est traitée de deux points de vue : d’un point de vue socio-psychologique et d’un point de vue scientifique. Il est remarquable que le rôle de l’observateur scientifique soit comparé à celui du chœur dans la tragédie grecque, ce qui renvoie à l’importance accordée à la littérature, malgré le statut de domination qui est officiellement attribué à la science. On voit donc bien que les deux auteurs dans leur pratique esthétique dépassent les principes de leur théorie, peignant l’image d’une relation extrêmement complexe entre la science et la littérature.

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« He Sees at Every Pore”

If, as Henri Bergson holds, a philosopher’s work is pervaded by the unfolding of a single thought, for Emerson it is the thought of "unfolding” itself. The driving force of Emerson’s thought is that form – whether natural form, object-form, political or moral form, forms of the self or of the mind – to remain vital can only be understood in terms of metamorphosis.

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La naturalisation de l’économie dans le roman du XIXe siècle

Résumé : Si l’histoire de la pensée économique et l’épistémologie de l’économie ont réfléchi, avec un intérêt renouvelé ces cinq dernières années, à la notion de loi naturelle de l’économie, c’est-à-dire à la prégnance de l’idée de nature et du modèle des sciences physiques sur la science économique à partir des physiocrates, il resterait à savoir en quoi les romanciers du XIXe siècle ont été exposés à ce naturalisme économique. Celui-ci paraît en effet en prise avec le roman réaliste du siècle : il fonde une anthropologie et formule des lois qui peuvent contribuer à configurer la fiction. Tentant de dépasser la simple étude des sources ou l’inventaire des lectures économiques des romanciers, le présent article se propose d’analyser un roman d’Yves Guyot, proche de Zola, économiste acquis aux formulations de Jean-Baptiste Say sur l’ordre naturel de l’économie, pour voir en quoi ce roman d’amateur pourrait participer d’une poétique libérale marquée par le naturalisme économique. C’est peine perdue, et on mesure ici la distance entre théorie économique et écriture de roman, mais ce mauvais exemple permet d’introduire à ce que serait l’expression romanesque des lois naturelles de l’économie.

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Photos

La photographie est le double de la littérature. Au moyen de son statut de témoin objectif, de document neutre, elle est science et savoir, mais grâce à l’opérateur, il y a subjectivité.

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Romans de la rupture épistémologique : quelques rémanences philosophiques et poétiques, de Rabelais et Cervantès à Goethe et Flaubert

Michel Foucault, dans Les Mots et les Choses : une archéologie des sciences humaines (1966), montre que la configuration générale du savoir occidental évolue, du XVIe au XXe siècle, au gré de deux changements de paradigme ou « ruptures épistémologiques » qui séparent l’épistémè renaissante de l’Age classique, puis l’Age classique de la Modernité. Le Quichotte de Cervantès (1605-1615) est selon Foucault l’œuvre représentative par excellence de la première rupture épistémologique, car le divorce entre « les mots » et « les choses » s’inscrit au cœur de son dispositif narratif. Mais le trouble épistémologique qu’induit la progressive sécularisation de la pensée occidentale est déjà sensible par exemple dans le Tiers Livre de Rabelais (1546). Chez Rabelais et Cervantès, ce trouble épistémologique s’exprime d’abord par la mise en scène (comique) de la discorde des autorités « savantes » et, plus profondément, de la discordance des discours du « savoir », source d’une suspension sceptique du jugement. Ce travail s’attache à mettre en lumière, dans des fictions narratives qui prennent acte de la seconde rupture épistémologique du tournant des XVIIIe-XIXe siècles, certaines analogies structurelles et stylistiques avec les fictions critiques de la Renaissance finissante : dans Les Affinités électives de Goethe (1809) et Bouvard et Pécuchet de Flaubert (1881), œuvres de la conquête de la modernité, la remise en cause des discours savants hérités de la Raison des Lumières rejoint un esprit de rébellion antidogmatique et humoristique qui caractérisait certains textes troublés de la fin de la Renaissance : contre le mouvement de spécialisation des discours savants qui aboutit, à la fin du XIXe siècle, à l’éviction de la « littérature » hors du champ de la connaissance désormais réservé aux « sciences », Goethe et Flaubert revendiquent pour la fiction littéraire une légitimité inédite, conquise sur les baudruches des faux savoirs. Mots-clés : Cervantès, épistémè, Flaubert, Foucault, Goethe, ménippée, Rabelais, rupture épistémologique, scepticisme, sério-comique

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L’utopie mystifiante du savoir dans Mardi d’Herman Melville

Résumé: La recherche d’une belle étrangère, disparue, à travers l’archipel de Mardi se double de la quête d’une vérité qui ne cesse de se dérober. Le narrateur qui se fait passer pour un demi-dieu incarne la tentation du savoir absolu. En contrepoint, les commentaires ironiques de ses compagnons de voyage mettent en lumière les limites prosaïques de la connaissance humaine. Il ne subsiste du rêve encyclopédique que des bribes burlesques. En définitive, la connaissance repose sur une forme de croyance et la foi en la science confine à la folie.

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L’accès aux lointains: Fiction et savoir au XVIIe siècle

Abstract: Entre le tournant copernicien négocié par Kepler et Galilée, et la rupture opérée par Newton, l’astronomie reste une science conjecturelle. Le débat cosmologique fait rage et s’appuie bien souvent sur des outils que nous ne considérons plus comme scientifiques : des récits, des images, des fictions. Dans les textes astronomiques du XVIIe siècle, à la fois sérieux et ludiques, scientifiques et imaginaires, se joue moins une « révolution astronomique » qu’une lente acceptation de l’idée d’une Terre excentrée dans un cosmos infini. La bataille doit d’abord être gagnée sur le front des images. Au cosmos ancien il faut substituer un cosmos élargi, transformé, un ordre des planètes bouleversé. Dans ce contexte, la fiction et le récit jouent un rôle central, car ils permettent de substituer une nouvelle image mentale du cosmos à l’ancienne. Seule la fiction peut permettre de dépasser les limitations du réel observable pour trouver un point de vue nouveau d’où décrire le monde.

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Zur Gegenwart der Naturgeschichte. Literarische Konfigurationen

On constate une remarquable renaissance de l’ancienne histoire naturelle (historia naturalis) dans le domaine de la littérature et de la culture (visuelle). Cette contribution examine le paradigme de la description et la science de la nature dont cette nouvelle histoire naturelle est porteuse pour en mettre en évidence les fonctions nouvelles comme alternative à la théorie de l’évolution sélectionniste et la génétique. Nous montrerons à partir de l’exemple de textes de A. S. Byatt, W. G. Sebald et Christoph Ransmayr (Die letzte Welt, Morbus Kitahara) les fonctions narratives et culturelles de cette histoire naturelle.

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Du mécanique plaqué sur du vivant : images de l’Africain-machine dans les discours scientifiques et littéraires occidentaux, XVIIIe-XXe siècles

  "L'Africain paroît être une  machine qui se monte et se démonte par ressorts, semblable à  une cire molle, à qui l'on…

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